Julieta ou le silence d’Almodóvar

Photo du film Julieta © Manolo Pavón El Deseo

Le dernier long métrage de Pedro Almodóvar exhale un parfum de mystère. Volontairement sobre, ce drame « pur » observe le personnage de Julieta, une protagoniste habitée par l’absence et tournée vers le passé. Un sixième film en Compétition, après Tout sur ma mère, Prix de la mise en scène en 1999, La Mauvaise Éducation (2004), Volver, Prix du scénario en 2006, Étreintes Brisées (2009) et La Piel que habito (2011).

Le film, qui devait initialement s’appeler Silence, s’éloigne de la verve madrilène pour laisser toute sa place aux non-dits, à travers le personnage interprété par Adriana Ugarte (Julieta dans les années 80 à 25 ans) et Emma Suàrez (Julieta aujourd’hui). Des silences incarnés par de nouvelles venues parmi les « chicas Almodovar », que le réalisateur espagnol a voulues tout en retenue.

En explorant à nouveau les rapports mère-fille, Almodovar signe, avec Julieta, un nouvel hommage à l’éternel féminin. Dans ce film de femmes marqué par la douloureuse absence de la fille de l’héroïne, « la douleur devient protagoniste et le silence accompagne », comme le souligne Emma Suarez à propos de son personnage. La fatalité, la culpabilité et la douleur d’une mère impriment le drame, dans un registre grave que le madrilène explore comme personne.

Non seulement la femme donne la vie, mais elle est aussi plus forte pour affronter, gérer, subir et apprécier tout ce que la vie apporte. Seul le hasard est plus fort qu’elle.

Un vingtième long métrage avec de nouvelles muses, mais aussi quelques complices de toujours, dont Rossy de Palma qu’il a voulu austère, une fois n’est pas coutume.

Julieta, qui trouve son origine littéraire dans trois des nouvelles du recueil Fugitives (Hasard, Bientôt et Silence) de la canadienne Alice Munro, revendique son absence d’humour et une bande-son discrète.