Rencontre avec George Miller, Président du Jury des Longs Métrages

George Miller, président du Jury des Longs Métrages © Valery Hache / AFP

Il a ravivé la saga Mad Max en 2015 et revient cette année présider le Jury des Longs Métrages. George Miller, 45 ans de carrière, s’est appliqué à explorer le vaste champ qu’ouvre le cinéma. La comédie fantastique avec Les Sorcières d’Eastwick, l’animation avec Happy Feet, qui lui a valu un Oscar en 2007, et le film d’action post apocalyptique avec Mad Max, dont la suite des aventures arrive bientôt sur écran. Rencontre avec un président chaleureux et passionné.

Nous sommes à mi Festival. Est-il plus facile de diriger l’équipe d’un tournage ou l’équipe d’un Jury ?

Il y a beaucoup plus de personnes dans une équipe de tournage ! Avec le Jury, c’est comme d’emmener ses enfants en vacances au pays du cinéma. Ce Jury est adorable, très compétent, très clair dans ses opinions. J’aimerais passer plus de temps à discuter avec eux parce qu’on pourrait parler des films sans jamais s’arrêter.

Quelles sont vos attentes en tant que Président du Jury du Festival ?

Voir des films merveilleux. Nous sommes à mi Festival et chaque film est particulier. C’est extraordinaire, on peut voir tout le potentiel du cinéma et se demander à soi-même « Comment jauger un bon film ? Comment décider s’il est réussi ? ». Chacun a son opinion sur ce que doit être le film qui fait vivre une forte expérience à tout point de vue. Pour moi, la réponse la plus simple, c’est que le film doit me suivre longtemps après sa projection.

George Miller - Dîner du Jury des Longs Métrages © Thomas Leibreich / FDC
George Miller - Dîner du Jury des Longs Métrages © Thomas Leibreich / FDC

En ce moment, vous voyez toutes sortes de films. Mais habituellement, qu’allez-vous voir au cinéma ?

Je ne vois pas autant de films que je le voudrais car je suis très occupé. Quand j’ai commencé, comme tous les réalisateurs, j’ai beaucoup appris en m’asseyant dans un fauteuil devant le grand écran. Je suis très éclectique, j’aime les documentaires, les drames… J’ai  tendance à éviter les films grand public, à moins qu’ils soient d’un excellent réalisateur ou qu’ils soient particuliers. Je ne fais pas partie de ces gens qui peuvent passer toute une journée dans les cinémas.

Exception faite de ces dix jours à Cannes…

Et c’est un plaisir parce qu’on n’a rien d’autre à faire. Le travail consiste à voir des films sur lesquels on ne sait rien puis à réfléchir à ce qu’on a vu.

On sait qu’il est risqué de faire des suites à des films qui ont connu un succès. Pourtant, vous relevez le pari et c’est une réussite. Quel est votre secret ?

Le processus de fabrication du film nous habite comme n’importe quelle expérience et c’est souvent très intense. Les personnages et l’univers du film vivent dans nos têtes comme des amis imaginaires. Je n’ai jamais eu l’intention de réaliser un autre Mad Max et j’en ai finalement fait quatre. Avec l’allégorie, les films peuvent être complets, universels. Dans Fury Road, on identifie des choses et je suis content que le public les repère. On y voit des comportements qui font écho à l’Histoire, à la vie, qu’on a déjà pu voir dans de nombreuses incarnations et cultures au fil du temps. Des personnes utilisées comme marchandises, c’est courant. Ça existe même aujourd’hui. Des personnes qui cherchent l’humain dans un monde très rude, qui cherchent le meilleur d’eux-mêmes dans ce monde, ça arrive au moment-même où nous parlons.

L’Histoire, leurs histoires vous influence ?

Elles s’installent en moi presque inconsciemment. Dans d’autres films, dans les infos, dans les romans… Je trouve ça très intéressant. J’ai assisté à une exposition d’armures vieilles de trois ou quatre siècles et il y avait une ceinture de chasteté en fer. Elle était forgée au niveau du vagin et de l’anus en forme de dents et ça m’a choqué que l’on puisse considérer une jeune femme comme source de péché. Cette image a été efficace dans Fury Road. Ça ne dure que deux ou trois secondes mais ça en dit long.

Votre filmographie est très éclectique. Vous semblez ne pas choisir de genre. En revanche, vous avez l’ai très attaché aux évolutions technologiques qu’offre le cinéma.

C’est quelque chose que j’aime beaucoup mais le plus important, c’est le récit. Disons que c’est un exercice technique, un défi technique. Le premier Babe, c’était au début du digital, juste après Jurassic Park.

Puis vous avez réalisé Happy Feet. Là, vous vous êtes laissé séduire par la motion capture ?

Je me suis rendu compte que je pouvais faire ce film quand j’ai vu la première motion capture du cinéma avec Le Seigneur des Anneaux. L’excellent directeur de la photographie Andrew Lesnie, qui a tourné Babe et Le Seigneur des Anneaux, m’a montré le film, la toute première motion capture de Gollum, et je me suis dit que c’était une formidable technologie.