Rencontre avec Naomi Kawase, Présidente du Jury de la Cinéfondation et des Courts métrages

Naomi Kawase - Présidente du Jury Cinéfondation et Courts métrages © Valery Hache / AFP

Diplômée en 1989 d’une école de cinéma, Naomi Kawase se tourne très vite vers la réalisation de documentaires, genre qu’elle affectionne et qui nourrit aujourd’hui encore sa manière de mettre en scène ses fictions. Tournés avec des moyens modestes, ses films lui apportent rapidement la reconnaissance internationale. À Cannes, la cinéaste devient en 1997 la plus jeune lauréate de la Caméra d’or avec Suzaku, avant de décrocher, dix ans plus tard, le Grand prix du Jury pour La Forêt de Mogari. Elle se remémore ses débuts derrière la caméra.

Quelle place attribuez-vous aux courts métrages dans la carrière d’un cinéaste ?

Pour moi, ils ont été très importants car à mes débuts, je n’avais pas le même soutien financier qu’aujourd’hui. Il m’aurait été difficile de débloquer des budgets aussi gros pour réaliser directement un long métrage. Le court métrage a donc constitué un moyen d’être tout de même en mesure de faire des films. Ce format a représenté une étape importante de mon parcours. Bien sûr, il permet à un jeune réalisateur de s’exercer, mais également d’être évalué et éventuellement reconnu.

De quelle manière préparent-ils à un premier film ?

Suzaku, mon premier long métrage, évoquait la famille, thème que j’avais également abordé dans mon dernier court métrage, réalisé juste avant. Les deux films se sont succédé dans une logique de continuité. C’est pour cette raison que je pense que les courts métrages font en général office de prémices au premier long.

Une école de cinéma, est-ce indispensable selon vous ?

J’ai étudié dans une école de cinéma pendant deux ans et cela me paraît important car vous y rencontrez des personnes qui ont le même but que vous, qui aspirent à toucher du doigt le même rêve. Vous y rencontrez bien-entendu des soutiens qui vous conseillent, mais aussi et surtout des rivaux qui vous mettent des bâtons dans les roues.

Quelle importance peut revêtir la cinéphilie dans l’élaboration d’un premier film ?

Lorsque j’ai débuté dans le cinéma, je n’avais pas vu énormément de films et pourtant, j’ai été capable d’en réaliser ! Le seul danger, avec la cinéphilie, c’est de vouloir trop imiter ses modèles et de perdre la part d’originalité qu'on porte en soi. Je trouve qu’il est important qu’un premier film ne recèle pas trop de choses qui ont déjà été explorées.

« Le problème, au moment d’aborder son deuxième film, c’est qu’on a tendance à surjouer le premier. »

Quelles sont les erreurs à ne pas commettre lors d’un premier film ?

Je pense qu’on peut tout se permettre lors d’un premier film ! Ce qu’il ne faut pas oublier, c’est de creuser la seule chose que vous êtes le seul capable de faire. De mon côté, je pense avoir fait une erreur : j’ai écrit le script de mon premier film en me basant sur mon imagination et quand je l’ai réalisé, j’ai essayé d’y coller scrupuleusement. Je ne ne l’ai pas laissé vivre.

Comment fait-on pour ne pas rater un deuxième film quand on n’a plus l’inconscience de la première fois ?

Quand vous rencontrez le succès avec le premier, c’est en général l’inverse qui se produit avec le second ! Mon premier film a remporté la Caméra d’or à Cannes, tandis que le second n’a jamais été diffusé, même en DVD ! Le problème, à l'aube de réaliser votre deuxième film, c’est que vous avez tendance à vouloir surjouer le premier, et c’est la mauvaise manière de d’aborder le projet. Le mieux, c’est de repartir de zéro. En général, les gens autour de vous s’attendent à retrouver l’énergie du premier.

Vous qui avez eu l’occasion de découvrir le travail de jeunes réalisateurs, comment trouvez-vous la nouvelle génération de cinéastes ?

Ils abordent des sujets qui n’auraient même pas été effleurés il y a cinquante ans. L'audace caractérise cette génération.