Le cinéma engagé pour le climat

Photo du film La panthère des neiges © Vincent Munier

 

Quel rôle peut avoir le cinéma devant l’urgence climatique ? A t-il réellement ce pouvoir d’influer sur notre écosystème ? Toutes ces questions, posées dans le feu de ce que nous impose la situation planétaire, trouvent leur place au Festival de Cannes. La sélection éphémère mais non moins complète de films sur l’environnement de la 74e édition est un panel captivant des différentes solutions qui s’offrent à chacun de nous, spectateurs concernés. Une fiction et six documentaires qui touchent au cœur, autant d’approches différentes.

Constats catastrophe 

Une solution consiste à dénoncer, montrer l’état d’un certain monde dans sa réalité crue. C’est le choix effectué par Zhao Liang avec l’ambitieux I'm So Sorry sur les dangers du nucléaire, ou Rahul Jain avec Invisible Demons, sur l’effrayant impact des particules fines en Inde. Des constats sans concessions qui forcent à s’interroger.

Voyages militants 

Auteur, poète, militant écologiste et réalisateur, Cyril Dion est aux antipodes de cette approche.

« Énormément de films parlent d’avenir et ce sont toujours des films apocalyptiques : mais, où sont les films qui imaginent un avenir différent ? Qui racontent comment on pourrait s’en sortir ? Si notre imaginaire n’investit pas ces territoires, on restera coincés dans notre perception du monde tel qu’il est aujourd’hui. La créativité a besoin d’être libérée. »

Six ans après le succès de Demain, Animal s’attache à redonner espoir, en nous incitant à nous interroger sur notre rapport au vivant.

« Le cinéma a un rôle à jouer face à cette urgence considérable, il peut proposer d’autres imaginaires, d’autres voies. Les cinéastes pourraient se saisir de cette question du climat pour raconter ce que ça leur évoque, et commencer à imaginer ce à quoi le monde pourrait ressembler si on faisait à peu près ce qu’il faut. »

Les documentaires de Flore Vasseur et de Cyril Dion donnent la parole aux jeunes. Animal alerte sur l’effondrement de la biodiversité et suit les questionnements des adolescents Bella et Vipulan, parcourant le monde à la recherche de sens et de solutions concrètes. Dans Bigger Than Us, Flore Vasseur, auteure de Meeting Snowden en 2017, parle d’une jeunesse qui se lève et qui agit, partout dans le monde.

« Il faut traiter le climat comme le symptôme d’un dysfonctionnement beaucoup plus important, celui de notre société. Nos enfants ont besoin d’avoir des raisons de vivre. »

Montrer la réalité locale

Avec le documentaire Marcher sur l’eau, Aïssa Maïga relate l’histoire d’un village victime du réchauffement climatique au Niger, qui se bat pour avoir accès à l’eau, question essentielle à sa survie. Les habitants ne sont pas responsables de ce réchauffement, ils en sont les premières victimes.

« Le cinéma fait partie d’un ensemble bien plus vaste : la question aujourd’hui est de créer un écosystème entre les politiques, les artistes et la société civile. De reconnecter des espaces qui n’agissent pas forcément ensemble. On va voir émerger une jeune génération de cinéastes qui ne permettra pas de traiter ces cinémas uniquement à la périphérie. »

La fiction

Le film de Louis Garrel, La Croisade, co-écrit avec Jean-Claude Carrière, opte pour la fiction générationnelle, celle qui dit la catastrophe. Au travers de ce couple secoué par leur fils qui a vendu tous leurs effets de valeur pour financer une mission secrète dans le but de sauver la planète, l’acteur-réalisateur signe un film drôle et satirique.

Célébrer le monde

Dans La Panthère des neiges de Marie Amiguet et Vincent Munier, un documentaire poétique qui dit la beauté du monde, la caméra de Marie Amiguet accompagne Sylvain Tesson et Vincent Munier sur les hauts plateaux du Tibet, dans l’attente de cette insaisissable panthère des neiges.

« Ralentir, observer, retirer nos œillères, regarder la beauté qui est autour de nous, c’est un peu naïf mais ce sont des sensations extrêmement fortes. »

Dans le cadre d’une manifestation d’envergure comme le Festival de Cannes, les intervenants de certains de ces films ont participé à une conférence de presse sur le thème du climat. De passionnantes interventions et des voix engagées, de celles des réalisateurs à celles de Bella Lack, Vipulan Puvaneswaran et Melati Wusen, jeunes activistes des films de Flore Vasseur et de Cyril Dion.