Rencontre avec Will Smith, membre du Jury des Longs Métrages

Will Smith, Membre du Jury des Longs métrages © François Durand / Getty Images

Révélé à la télévision dans la célèbre sitcom humoristique Le Prince de Bel-Air (1990-96), puis dans la musique, Will Smith s’est ensuite imposé au grand écran comme l’acteur star des années 2000, notamment grâce la trilogie Men in Black, de Barry Sonnenfeld (1997-2012). Il évoque sa carrière avec lucidité et décrit son expérience au sein du Jury comme un électrochoc.

Le Festival touche à sa fin. Une impression ?

C’est l’une des plus fantastiques expériences de cinéma de ma vie. Regarder deux ou trois films par jour, réalisés par des cinéastes majeurs, puis s’asseoir autour d’une table avec des gens aussi brillants pour échanger nos impressions sur ce que le cinéaste a réussi à faire, ou dans certains cas, évoquer ce qu’il aurait pu faire… c’est incroyable ! J’ai réalisé au fil de ces conversations que je n’avais jamais lu ou entendu d’aussi bonnes critiques de films. Jamais des points de vue n’ont été aussi puissants, profonds et justes à mon oreille que ceux formulés depuis dix jours par les membres de ce jury.

Est-ce que côtoyer tous ces artistes a fait résonner quelque chose en l’acteur que vous êtes ?

Je suis persuadé que cette expérience va apporter un nouveau souffle à ma carrière. Elle est venue me rappeler quel est le but premier d’un film : divertir et sublimer. Les histoires que nous racontons au spectateur doivent être conçues avec l’ambition de montrer la voie à suivre ou à ne pas suivre. J’ai rencontré un succès immense grâce à des films commerciaux auxquels vous pouvez parfois devenir accro. Le résultat de cette addiction, c’est qu’elle peut vous détourner de ce que vous souhaitez accomplir quand vous faites du cinéma. Je me suis régénéré et j'ai comme ravivé le but que je m’étais fixé à mes débuts : faire en sorte, grâce au cinéma, que les gens aient une vie meilleure.

Parlons du passé. Quand avez-vous été piqué par l’amour de la scène et du divertissement ?

J’ai toujours adoré le divertissement. Plus jeune, dans ma bande, c'était moi qui faisais l'idiot. Je ressentais le besoin de me nourrir de cette énergie. Dans ma famille, l’humour avait aussi une place centrale et naturelle. Mon père n’avait de cesse de faire le pitre. Quant à ma grand-mère, elle était en charge d’enseigner aux enfants les chants que nous devions répéter à l’église. Le mélange des deux m’a en quelque sorte prédisposé. C’est comme si ma vie était une immense scène.

« La bataille entre ce que je suis et l’image que je renvoie a débuté »

Votre premier choc de cinéma ?

Star Wars ! C’est la première fois que je suis resté bouche bée devant un film. J’étais véritablement K.O. La technologie, l’histoire… c’est comme si ce film avait été fait pour moi ! Thriller aussi, le court métrage avec Michael Jackson, pour le mélange entre musique et cinéma. Dans mon esprit, ce mélange a toujours existé et s’est toujours bien accordé. Star Wars et Thriller sont probablement deux des films qui m’ont le plus secoué.

Un acteur que vous admirez ?

C’est drôle, mais les acteurs qui m’ont le plus influencé sont issus de la comédie musicale. D’ailleurs, il ne faut pas oublier que c’est la musique qui m’a mené au métier d’acteur. Pour le cinéma, je citerais Humphrey Bogart. Le film que j’ai le plus étudié dans ma carrière, c’est Casablanca, le long métrage de Michael Curtis (1942). Pour moi, ce film est proche de la perfection. C’est un chef-d’œuvre. L’autre film qui m’a profondément marqué est Le Pont de la Rivière Kwaï de David Lean. C’est mon film préféré.

L’acteur a-t-il changé l’homme ?

Bien sûr. Jusqu’à présent, l’acteur et le performeur ont influencé l’homme. Aujourd’hui, parce que j’ai vieilli, c’est l’inverse qui se produit. L’homme que je deviens prend le pas sur l’acteur. J’ai davantage le courage de jouer en m’appuyant sur ce que je suis. La bataille entre ce que je suis et l’image que je renvoie a débuté.

Quelle est votre meilleur souvenir de la période du Prince de Bel-Air ?

Je vais plutôt vous livrer un sentiment qui, je crois, s’appliquait à chacun des acteurs de la série : existe-t-il une meilleure place dans le divertissement que la sitcom à la télévision ? Chaque jour, je me rendais sur un plateau pour y retrouver des gens que j’adorais. Nous passions la journée à nous comporter sur le plateau de la manière la plus folle et stupide qui soit. Et le résultat était diffusé à la télévision ! Ça a été six années dont j’essaye toujours de retrouver les sensations. Nous étions très libres sur le tournage. L’impertinence de toute notre bande faisait qu’on était capable de faire et de dire n’importe quoi.