Palme d’or : les années 1980

Nastassja Kinski dans Paris, Texas de Wim Wenders © Tamasa Distribution

 

Dans les années 1980, la Sélection officielle s’érige contre la censure et les diverses pressions internationales. Privilégiant la liberté d’expression, elle révèle de jeunes réalisateurs en provenance du monde entier comme Stephen Frears, Leos Carax, Lars Von Trier, Spike Lee, Jim Jarmusch, André Téchiné ou encore Emir Kusturica. Certains d’entre eux sont sacrés sur scène aux côtés de réalisateurs déjà établis comme Akira Kurosawa, Maurice Pialat ou Wim Wenders.

Retour sur une décennie de Palmes d’or à voir et revoir à la maisons.

All That Jazz (Que le spectacle commence) de Bob Fosse (1980)

 

Alors qu’Hollywood se désintéresse peu à peu de la comédie musicale, Bob Fosse, metteur en scène de « Chicago » en 1975, renouvelle le genre en s’inspirant de sa propre vie. Dans Que le spectacle commence, Roy Scheider incarne Joe, un chorégraphe de Broadway en pleine préparation de spectacle. Au sommet de sa gloire, il est victime d’une crise cardiaque. Sur son lit de mort, il fantasme alors ses adieux à la scène.

Le film est devenu tristement prémonitoire lorsqu’en 1987, Bob Fosse est mort d’épuisement à la tâche.

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影武者, Kagemusha (Kagemusha, l'ombre du guerrier) d’Akira Kurosawa (1980)

 

Kagemusha, l’ombre du guerrier, Palme d’or ex aequo du Festival de 1980, marque la consécration d’Akira Kurosawa. Alors que le réalisateur japonais a déjà derrière lui une importante filmographie, Georges Lucas et Francis Ford Coppola offrent de financer la tragédie shakespearienne qu’il souhaite réaliser depuis des années.

L’histoire se déroule dans le Japon féodal. Shingen, le chef du puissant clan des Takeda est grièvement blessé lors d’une bataille. Avant de mourir, il demande à ce que sa disparition soit tenue secrète pendant trois années. Le prisonnier Kagemusha, épargné pour sa ressemblance avec Shingen, doit devenir sa doublure… C’est l’acteur Tatsuya Nakadai qui incarne avec brio les deux rôles principaux.

Człowiek z żelaza (L’Homme de fer) de Andrzej Wajda (1981)

Boguslaw Linda et Marian Opania dans L’Homme de fer de Andrzej Wajda

Boguslaw Linda et Marian Opania dans L’Homme de fer de Andrzej Wajda

 

Pologne, 1980. Lors de la grève des chantiers navals de Gdansk, Winkel est un journaliste de la télévision d’état chargé par un responsable politique d’enquêter sur les syndicats et de ternir leur image. Lorsque Winkel réalise qu’il a été manipulé, il décide de rejoindre les grévistes.

Avec L’Homme de fer, le réalisateur polonais Andrzej Wajda s’inscrit dans la continuité de L’Homme de marbre (1977). La portée politique de son œuvre atteint son point culminant en décembre 1981, lorsque l’état de siège est proclamé dans le pays.

Missing de Costa-Gavras (1982)

 

Adapté du roman de Thomas Hauser, Missing fait écho aux précédentes fictions politiques réalisées par Costa-Gavras telles que Z (1969) et L’Aveu (1970). Il s’inspire de l’histoire du journaliste américain Charles Horman, emprisonné au Chili après le coup d’état de Pinochet en 1973. Avec ce brûlot politique où un père (Jack Lemmon) et sa belle-fille (Sissy Spacek) partent à la recherche du disparu (John Shea), le réalisateur rend aussi hommage au Président Salvador Allende.

Yol (Yol, la permission) de Yılmaz Güney et Şerif Gören (1982)

Palme d’or ex aequo du Festival de Cannes en 1982, Yol, la permission, dénonce également un régime dictatorial. Le film narre le destin de cinq détenus turcs à qui une permission d’une semaine est accordée.

Yılmaz Güney écrit le scénario en turc et en kurde alors qu’il est incarcéré à tort pour homicide. Il profite d’une autorisation de sortie de prison pour fuir le pays, et est recherché par Interpol au moment même où son film est projeté à Cannes.

楢山節考, Narayama bushiko (La Ballade de Narayama) de Shōhei Imamura (1983)

 

La Ballade de Narayama est la première Palme d’or du réalisateur japonais Shōhei Imamura. Le film nous plonge au milieu du XIXe siècle, dans le quotidien d’un village du Nord du Japon. Selon la tradition, Orin (Sumiko Sakamoto) a atteint, à 70 ans, l’âge de se retirer sur le mont Narayama pour y mourir. Son fils Tatsuhei (Ken Ogata) a la lourde tâche de la porter sur ses épaules et de l’abandonner aux vautours en haut de la montagne.

Avec ce film, l’héritier de la nouvelle vague japonaise livre une critique de la société moderne : « Pour moi, le Japon actuel n'est qu'une fiction. » déclare Shohei Imamura.

Paris, Texas de Wim Wenders (1984)

 

Un homme en costume erre dans le désert. Cela fait quatre ans qu’il a disparu. Son frère Walt vient le chercher à la frontière du Mexique et le ramène à Los Angeles en voiture. Mais l’homme, nommé Dean, semble avoir perdu la mémoire et l’usage de la parole. Après avoir retrouvé son fils, il décide de partir avec lui à la rencontre de la femme qu’il a aimée.

Porté par Harry Dean Stanton, Nastassja Kinski et Dean Stockwell, le film est une adaptation de Motel Chronicles de Sam Shepard.

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Отац на службеном путу, Otac na službenom putu (Papa est en voyage d'affaires) de Emir Kusturica (1985)

Papa est en voyage d'affaires de Emir Kusturica

Papa est en voyage d'affaires de Emir Kusturica © Centar Films

 

En Yougoslavie, au début des années 50, alors que la scission entre Tito et Staline remet en question le rapport au communisme, le jeune Malik observe le monde des adultes. Un jour, son père disparaît et sa mère lui explique qu’il est parti en voyage d’affaires. En réalité, il a été envoyé dans un camp de travail après avoir été dénoncé par sa maitresse. Malik, en réaction aux crises que traversent sa famille et son pays, se réfugie dans le somnambulisme…

Pour son deuxième long métrage, Emir Kusturica met en scène ceux qui deviendront ses acteurs fétiches : Miki Manojlovic, Davor Dujmovic et Mirjana Karanovic.

The Mission (Mission) Roland Joffé (1986)

Robert De Niro et Jeremy Irons dans Mission de Roland Joffé

Robert De Niro et Jeremy Irons dans Mission de Roland Joffé

 

Au XVIIIe siècle, dans une région inexplorée d’Amérique du Sud se trouve une communauté jésuite menée par le père Raphaël (Jeremy Irons). La congrégation a pour but de convertir à la religion le peuple guarani. Ils sont rejoints par Rodrigo Mendoza (Robert De Niro), un mercenaire devenu prospère grâce au commerce d’esclaves et qui est en quête de rédemption. Les deux hommes vont s’allier pour lutter contre la domination espagnole et portugaise.

Drame historique humaniste, Mission est porté par la musique d’Ennio Morricone.

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Sous le soleil de Satan de Maurice Pialat (1987)

 

« Si vous ne m'aimez pas, je peux vous dire que je ne vous aime pas non plus. », déclare Maurice Pialat alors qu’il reçoit la Palme d’or sous les huées. Sous le soleil de Satan déchaîne alors les passions. Le film est l’adaptation du roman de George Bernanos, auteur déjà porté à l’écran par Robert Bresson avec Journal d’un curé de campagne (1951) et Mouchette (1967). Gérard Depardieu incarne l’abbé Donissan, officiant dans un village lugubre sous la tutelle de l'abbé Menou-Segrais (Maurice Pialat). Une adolescente du nom de Mouchette (Sandrine Bonnaire) lui confesse le crime qu’elle vient de commettre. Torturé et mystique, le jeune ecclésiastique livre son combat contre le Mal.

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Pelle erobreren (Pelle le conquérant) de Bille August (1988)

Billie August adapte une célèbre saga romanesque de la littérature danoise, écrite entre 1906 et 1910 par Martin Andersen Nexø. Au XIXe siècle, Lasse (Max von Sydow) et son jeune fils Pelle (Pelle Hvenegaard) quittent la Suède pour émigrer vers le Danemark par la mer en quête d’une vie meilleure. Arrivés à destination, ils sont exploités par un fermier et doivent se résoudre à vivre dans la misère.

Le film obtient l’Oscar du Meilleur film étranger en 1989.

Sex, Lies, and Videotape (Sexe, Mensonges et Vidéo) de Steven Soderbergh (1989)

Ann et John Bishop (Andie MacDowell et Peter Gallagher) forment le couple idéal, mais ne se désirent plus. Un ancien ami de John, Graham (James Spader) apparaît dans leur vie et sème le trouble. Il collectionne les confessions filmées de femmes sur leur vie sexuelle…

Après Louis Malle, Steven Soderbergh est le deuxième plus jeune réalisateur à recevoir la Palme d’or avec son premier film Sexe, Mensonges et Vidéo.

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