Quel est le point de départ de Marcel! ?
L’étincelle est née durant les répétitions de mon court métrage, Être ma mère (2020). Alba Rohrwacher y interprétait déjà le personnage de la mère et Maayane celui de sa fille. Entre deux prises, j’ai vu Alba s’amuser avec Maayane. Elle la faisait jouer au petit chien et aboyer. Cet instant concentrait tout ce que je souhaitais raconter : l’amour, la férocité, la fidélité, la confiance et la haine qui lient une mère et sa fille. Plus que le nom du chien du film, Marcel! est un cri qui cache notre incapacité à lâcher les personnes que nous avons aimées.
Quand avez-vous senti que le moment était venu pour vous de passer à la réalisation ?
Les histoires nous habitent, j’en suis persuadée. Certaines restent ancrées en nous, d’autres nous traversent et s’en vont. Et puis il y a celles qui restent là, blotties longtemps dans quelques méandres de notre esprit et grandissent lentement jusqu’à devenir si imposantes qu’il nous faut les raconter pour qu’elles puissent laisser la place à une autre. Il fallait que cette histoire existe en dehors de ma tête.
Le film narre l'histoire d'une enfant quelque peu délaissée par sa mère. Quelle est sa part autobiographique ?
La relation avec ma mère a été constitutive de mon existence. En la retraçant, j'ai voulu mettre en lumière certaines des dynamiques profondes de la relation mère/fille. Elles restent, dans l'analyse et dans la narration, encore quelque chose de refoulé, un territoire peu investigué et peu investigable car les hommes s'en sentent naturellement exclus. J'ai simplement utilisé la caméra comme l'œil de ma mémoire. C'est la subjectivité qui gouverne cette histoire et non le réel.
C'est aussi un film sur la liberté de se montrer tel qu'on est. Qu'avez-vous souhaité raconter ?
Que la vie est partout, que les femmes sont tordues, différentes de comment nous les racontons ou les décrivons, et qu'à l'intérieur de cette distorsion un peu folle, elles s'autodéterminent et portent en elles le germe douloureux d’une liberté révolutionnaire.