À la rencontre des lauréats du 74e Festival de Cannes

Jury et Lauréats – Cérémonie de Clôture 2021 © Valery Hache / AFP

 

Les lauréats de la 74e édition du Festival de Cannes se sont présentés devant la presse à l'issue de la Cérémonie de Clôture. En voici les morceaux choisis.

Courts-métrages :

Tang Yi – Palme d’or

On dit souvent que les femmes parlent trop fort, mais moi j’ai voulu élever la voix. Il faut croire en sa bonne étoile et ne pas avoir peur de se tromper. Tous les grands maîtres du cinéma ont fait des erreurs.

Jasmin Tenucci – Mention Spéciale du Jury

J’étais remplie de joie, c’est un tel honneur. C’est inimaginable pour moi, et d’autant plus émouvant de voir deux femmes lauréates. Les femmes sont devenues plus autonomes, elles peuvent se permettre de parler plus haut et plus fort et de ne pas plaire à tout le monde. Le cinéma est un outil puissant qui favorise le changement.

Caméra d’or :

Antoneta Alamat Kusijanović, représentée par son co-scénariste Frank Grazziano

Rien que le fait d’être dans cette salle, c’était comme un rêve. Même après avoir vu tous les photographes, et après avoir pris l’air, je ne peux toujours pas croire ce que j’avais en main. C’est la semaine la plus incroyable possible pour Antoneta. Son film est à Cannes, elle a son premier enfant, et en plus elle obtient la Caméra d’or. Beaucoup d’émotions, de fierté.

Mélanie Thierry, Présidente de la Caméra d’or

Les films font voyager. On part dans tous les endroits de la planète. Même s’il y a des envies, et un point de vue différent, il y a des thèmes qui reviennent, comme la famille, les questions politiques, l’émancipation des femmes. Murina fait appel au mythe et aux déesses, à quelque chose d’assez éblouissant, mystérieux et poétique. Elle filme les fonds marins d’une façon que l’on ne m’a jamais montrée au cinéma. On a été bouleversés par son film, on a tous reçu la même émotion, il y avait comme une évidence.

Prix du Scénario :

Ryusuke Hamaguchi

Ce prix est essentiellement dû à l’œuvre originale et à la force des personnages. Pour moi l’important c’était de prendre le temps de montrer comment les sentiments finissent par affleurer. La fluidité du scénario était aussi très importante car pour un film de cette durée, il ne fallait pas qu’il soit une charge pour le spectateur. C’est l’évolution des personnages qui fait évoluer la mise en scène.

Prix de la Mise en scène :

Leos Carax, représenté par les Sparks, qui ont co-signé le scénario d'Annette

Ron Mael : Il y a toujours des séquences musicales dans les films de Carax. Nous avions une foi totale en Leos et nous ne pouvons pas être plus satisfaits du résultat. Nous avions en tête des idées de scène, et ce film est allé bien plus loin que nos espérances.

Russell Mael : C’est un réalisateur très singulier, mais il a vu quelque chose de particulier dans cette histoire. Nous avons coopéré pendant 8 ans, entre Los Angeles et Paris. Nous avions la même vision de ce qu’un film musical pourrait être aujourd’hui, s’éloignant des clichés de Broadway ou d’Hollywood.

Prix d’interprétation masculine :

Caleb Landry Jones

Quand on a terminé le film, j’ai eu le sentiment que nous avions vraiment réalisé quelque chose. C’était une façon de travailler assez nouvelle. Nous avions ensuite la responsabilité d’en faire le meilleur montage. C’était merveilleux de voir la réaction du public, j’ai l’impression que le film a été compris.

Grand Prix ex-aequo :

Asghar Farhadi

J’écris très spontanément ce qui émane de mon imaginaire. L’approche que j’essaye d’avoir est celle d’un conteur, de raconter une histoire qui ne lasse pas le spectateur. Je n’aime pas établir des divisions entre mon public, entre ceux qui connaissent, qui sont cinéphiles, et les autres. J’aimerais que chacun approche le film de la même façon. Le secret, ou en tout cas l’approche que j’ai adoptée, c’est de raconter des histoires. Je pense que tout être humain aime qu’on lui raconte des histoires.

Juho Kuosmanen

Je veux toujours travailler avec des gens que je connais, avec lesquels je suis à l’aise. Ce que je ressens avec différentes personnes a un impact sur la façon dont je tourne. C’était un film intime, avec une petite équipe. D’abord, je pensais que ce film portait sur une rencontre entre deux personnes différentes. Mais j’ai pris conscience qu’il ne s’agissait pas de personnes différentes mais de personnes identiques, on a l’impression que ce sont des jumeaux. Entre la pré-production et le tournage, nous avons fait 30 000 km de train en Russie.

Prix du Jury ex-aequo :

Nadav Lapid

Mon film a partout été défini comme un film choc, comme une claque, mais ce n’est pas un film violent, avec des scènes tendues. C’est juste des mots, des images combinés ensemble qui produisent l’effet d’un choc, d’une gifle, d’une claque. Chaque être humain qui irait voir mon film y verra un long métrage rempli de rage, de colère, de tristesse, mais aussi d’une intimité énorme. S’il n’y a pas de rage, de colère, il n’y a pas d’intimité. C’est très facile d’être indifférent. J’avais l’impression d’être dominé par le film. Les émotions et les pensées ont mille couleurs et, si on relie à cela les mouvements de caméra, on arrive à la Lune.

Apichatpong Weerasethakul

Je suis extrêmement satisfait, plein de joie de cette reconnaissance. Rien que de pouvoir être projeté est une grande chance. Ce prix va aider à présenter ce film. Tilda est mon ancre dans le film. Elle embrasse la vie sans peur, et en même temps elle montre la vulnérabilité. J’ai beaucoup appris d’elle. Notre amour du cinéma est tout à fait mutuel, nous avons élaboré Memoria sur la base de cet amour, comme une sculpture. Je pense que le monde des esprits est une échappatoire. Lorsque l’on ne peut pas traiter de la réalité, le monde de l’esprit et des rêves est un espace que l’on s’octroie.

Prix d’interprétation féminine :

Renate Reinsve

C’est une histoire très personnelle, on voulait exprimer un message universel. Je me sens très proche de ce personnage, je m’y vois. Il y a des moments où j’ai l’impression d’être la pire personne du monde, et les choses ne cessent de changer. C’est très difficile de trouver une identité que l’on garde à tout jamais. C’est un conflit intérieur. On a beaucoup répété, il y avait peu d’improvisation, mais le style de Joachim est très libre. On s’est laissé aller, on a évolué avec le film.

Palme d’or : 

Julia Ducournau

Je suis fière de moi. J’espère que le prix vaut pour mon film et pas pour mon genre. Mon genre ne me définit pas. Étant la deuxième femme à recevoir ce prix, j’ai beaucoup pensé à Jane Campion, je dois dire qu’en tant que seconde, ce qui me porte c’est que je fais partie d’un mouvement en marche. Il y aura une troisième, quatrième, cinquième. Ce n’est jamais facile d’être libre, quelques soient les circonstances. La liberté n’est pas un acquis. C’est un combat de tous les jours.

Vincent Lindon

J’adore Julia depuis longtemps, je suis très fier d’être dans ce film. Il y a quelques années, je n’aurais peut-être pas compris toutes les nuances du film et je n’aurais peut-être pas accepté la proposition. Il y aura un avant et un après pour moi, elle m’a appris à lâcher prise sur des zones de confort dans lesquelles les acteurs se mettent. C’est un des plus beaux souvenirs de cinéma de ma vie.