Doroteya Droumeva tord le cou au patriarcat dans The Vagabonds

Photo du film THE VAGABONDS de Doroteya DROUMEVA © DR

Femme d'âge moyen avec préférence pour des partenaires plus jeunes cherche contact humain sincère. Dans The Vagabonds, son premier long métrage, la réalisatrice bulgare Doroteya Droumeva aborde les questions des jugements de valeur arbitraires, des préjugés et de la masculinité toxique auxquels sont confrontées les femmes.

Quel est le point de départ de ce projet ?

The Vagabonds est inspiré par mon expérience personnelle. Mais ce n'est pas un film autobiographique. Je l’ai romancé en grande partie. Un vagabond est quelqu'un qui adopte un mode de vie nomade, sans attaches avec un lieu géographique en particulier et les personnages de mon film sont en ce sens des vagabonds car ils sont à la recherche de leur propre identité dans un monde en constante évolution. J'ai réalisé The Vagabonds avec de jeunes cinéphiles. Le film est entièrement auto produit.

 

Qu’avez-vous souhaité creuser ?

Le personnage de Nora est en quelque sorte mon alter ego. Elle sort avec des hommes plus jeunes qu’elle et elle doit toujours se justifier car il s’agit d’un tabou sociétal. Ce type de relations est généralement stigmatisé et les femmes qui ont des partenaires plus jeunes sont traitées de cougars, un terme qui vient de l’industrie du porno. Elles sont traitées de façon très sexiste et misogyne, alors qu’elles devraient être libres de faire leurs choix sans être jugées. L'inverse – un homme plus âgé avec une femme plus jeune – est socialement davantage valorisé par le patriarcat. Nora est par ailleurs confrontée à une certaine masculinité toxique en plus des préjugés. Je pense qu'il existe également une féminité toxique, mais ce n'est pas un problème de société comme la masculinité toxique, qui est plus largement répandue. The Vagabonds un film personnel, mais il ne comporte aucun message politique.

« Je voulais filmer la relation de Nora avec son jeune partenaire d’une manière réaliste et naturaliste ».

Les corps sont très importants dans votre film. Comment les avez-vous abordés du point de vue de la réalisation ?

J'ai voulu filmer la relation de Nora avec son jeune partenaire d'une manière réaliste et naturaliste et ne pas censurer quoi que ce soit. Seule la dernière scène, où elle est portée par les joueurs de football américain dans leur vestiaire, comporte une touche poétique car il s'agit davantage du monde intérieur de Nora. Cette scène montre à quel point elle apprécie réellement cet état d'anarchie avec les corps nus des joueurs de football américain. Cette scène est évidemment sujette à interprétation.

 

Que dit votre film de l'Allemagne d'aujourd'hui ?

L'histoire du film se déroule dans le milieu berlinois des expatriés. Il souligne qu’il existe des préjugés envers les femmes qui sortent avec des partenaires plus jeunes même dans des cercles d'artistes intellectuels qui passent pour être plus ouverts d'esprit.

 

Avez-vous un nouveau projet sur lequel vous pouvez dire quelques mots ?

J'ai écrit un scénario sur un autre personnage féminin. Il n'y a pas tellement de films montrant le point de vue des femmes et cette situation résulte du « mansplaining » encore en vigueur dans notre société. Espérons qu'il y aura plus de films réalisés par des femmes à l'avenir dans cette profession dominée par les hommes, aussi bien dans la réalisation que dans la production de films.