Photo du film Lingui (Lingui, les liens sacrés) © Pili Films
Lingui, hommage aux femmes tchadiennes
Un homme qui crie, Prix du Jury 2010, Grigris en Compétition en 2013, Hissein Habré, une tragédie tchadienne (2016), documentaire Hors Compétition sur les stigmates du régime dictatorial de l’ancien chef d’Etat, et enfin Lingui, les liens sacrés, un drame féminin en Compétition tourné au Tchad. Dans ce dernier long métrage, Mahamat-Saleh Haroun retrouve Mathieu Giombini à l’image, et choisit la suggestion plus que la dénonciation pour approcher la réalité sociale des femmes de son pays, où l’avortement est interdit.
Qu’est-ce que le lingui ? Ce terme tchadien qui représente le lien symbolise le vivre ensemble, une entraide pensée « pour ne pas laisser l’autre s’effondrer, une notion de solidarité qui vient de la tradition ».
En creusant les relations entre Amina (Achouackh Abakar Souleymane) et sa fille unique de 15 ans, Maria (Rihane Khalil Alio), le Tchadien invite à comprendre le lingui, et dédie son film à des personnages féminins pour la première fois. Après l’exploration des relations père-fils dans Un homme qui crie, Mahamat-Saleh Haroun procède à une radioscopie de la réalité sociale de son pays au travers de ce passionnant portrait de femmes, abordant la question de la protection sociale dans un pays où elle est inexistante. En témoigne le projet bien entamé de « code de la famille », sorte de planning familial qui prévoyait d’aider les femmes autour de la grossesse et de la contraception, et qui n’a jamais vu le jour. Subtile et discrète, la solidarité entre femmes au Tchad, elle, est bien réelle et s’oppose au socle patriarcal de cette société. Le réalisateur a conçu son film comme un hommage aux femmes combatives et libres, à l’image de sa grand-mère dont il s’est inspiré : des femmes qui n’hésitent pas à réaliser des travaux ingrats comme Amina que l’on voit fabriquer des fourneaux (kanoun) à l’image.
Dans ce nouveau long métrage, le metteur en scène préfère l’ellipse aux messages appuyés, forçant le spectateur à faire preuve d’empathie. Le lingui.
