Vayehi Boker : fable dans un village encerclé par l’armée israélienne

Photo du film Vayehi Boker (Et il y eut un matin) © DORI MEDIA / LES FILMS DU POISSON

 

Porter des voix singulières, telle est la mission d’Un Certain Regard. Le cinéma d’Eran Kolirin s’inscrit dans cette sélection pour la troisième fois, après les succès de La Visite de la fanfare (Coup de cœur du Jury Un Certain Regard en 2007) et Au-delà des montagnes et des collines (2016). Son dernier film, Vayehi Boker (Et il y eut un matin), est une libre adaptation d’un roman de Sayed Kashua.
 

Sami, Israélien arabe, vit à Jérusalem. Il est obligé de retourner là où il a grandi, le temps du mariage de son frère. Mais dans la nuit, l’armée encercle le village et Sami se retrouve coincé. Pourquoi ? Pour combien de temps ? L’ambiance se tend sur ce bout de terre désormais coupé du monde et tout dans la vie de Sami est remis en question.

Le titre, Et il y eut un matin, annonce la tonalité. Eran Kolirin déroule une fable, lieu de libertés artistiques et esthétiques, sans faire l’impasse sur une certaine cruauté, à portée politique. Quelle identité pour les arabes d’Israël ? Comment être entendu lorsque tout réduit au silence ? Eran Kolirin s’interroge :

« Nous n’y donnons pas de leçon, mais il s’agit de faire éprouver ce que quelqu’un peut ressentir quand il se retrouve encerclé par un mur, et crie sans être entendu. »

Malgré des sollicitations hollywoodiennes pour d’autres projets, le réalisateur a choisi de travailler sur le roman éponyme de Sayed Kashua. Avec la bénédiction de l’auteur, il s’est autorisé quelques libertés dans l’adaptation. Le personnage du livre par exemple, un journaliste rétrogradé, devient un comptable dans le film. L’essence du roman reste néanmoins au cœur du travail d’adaptation, cette question sensible traitée avec poésie, celle de deux communautés qui se font face sans dialoguer.