Bruno Dumont fait éclater le système des médias dans France

Photo du film France © 3B

 

Après Jeanne, qui avait obtenu une Mention Spéciale du Jury Un Certain Regard en 2019, Bruno Dumont est de retour à Cannes, en Compétition cette fois, avec France. Portrait désabusé du monde des médias et critique de sa mise en scène fictionnelle du réel, le film est centré sur une célèbre journaliste d’une chaîne d’information en continu, incarnée par Léa Seydoux.

Il s’était déjà tourné vers les écrits de Charles Péguy en adaptant les œuvres « Jeanne d'Arc » (1897) et « Le Mystère de la charité de Jeanne d'Arc » (1910) pour ses films Jeannette, l'enfance de Jeanne d'Arc, et Jeanne. C’est également un recueil d’écrits de cet auteur, publié de façon posthume sous le titre « Par ce demi-clair matin », qui a inspiré le film France à Bruno Dumont.

France de Meurs est une célèbre journaliste adorée de tous, grande star des médias, connue pour les reportages choc qu’elle réalise pour une chaîne d’information en continu. Comme souvent lors d’une ascension médiatique, la redescente est brutale. Ce qui est encore vu par les spectateurs comme de l’originalité, de l’audace et une vision crue de la réalité, ne devient tout à coup aux yeux de France plus que mascarade, filtre, théâtre. Avec France, Bruno Dumont porte à l’écran la désillusion d’une femme aspirée par un système hyper-connecté, hypertrophié et malsain, et livre une critique acerbe et piquante du milieu du journalisme d’actualité, dans lequel le réel semble se proposer comme tel, alors qu’il est reconstruit, retravaillé, mis en scène.

Dès lors, France de Meurs se fait incarnation de cette France, le pays cette fois-ci, qui alimente cette machine médiatique à la recherche du buzz, du choc, du spectaculaire, une facette incarnée par Blanche Gardin, productrice de télévision obsédée par l’audimat. Un film qui questionne non sans audace un système aliéné et aliénant dans lequel, selon Dumont, « la réalité devient une fiction, le réel, un monde parallèle ».