Girl, le regard de Lukas Dhont

Photo du film Girl © DR

Avec Girl, le réalisateur belge Lukas Dhont signe un premier long métrage dans lequel il s’interroge sur la question du genre à travers le personnage de Lara, 15 ans, une jeune fille née garçon, qui rêve de devenir danseuse étoile. Présenté à Un Certain Regard, le film est en lice pour la Caméra d’Or.

Comment avez-vous eu l’idée de réaliser ce film ?

J’ai lu un article en 2009 dans un journal belge sur une jeune fille, née garçon, qui rêvait de devenir ballerine. Cette histoire m’a immédiatement frappé, je n’ai pas cessé d’y penser. J’étais tombé amoureux de cette fille. Elle était un exemple de courage et je me disais : si je réalise un premier long métrage, je veux qu’il raconte son histoire. 

Quelle était l’ambiance sur le tournage ?

Nous avons tourné durant deux mois, en été 2017. Un des plus gros challenges était d’enseigner toutes les chorégraphies aux jeunes danseurs, âgés de 15 ans pour la plupart. Ils ont répété pendant les trois mois qui ont précédé le tournage, et nous avons filmé toutes les scènes de danse en six jours. Nous voulions filmer à 360 degrés dans le studio de danse, ce qui signifiait qu’une partie de l’équipe devait rester cachée derrière les miroirs alors que les interprètes devaient danser tout le long.

Quelques mots sur vos acteurs ?

Quand nous avons eu fini d’écrire le film avec Angelo Tijssens, nous avons su qu’il allait être particulièrement difficile de trouver quelqu’un pour incarner le rôle principal. Lors du casting, nous avons vu plus de 500 enfants : des filles, des garçons et des jeunes gens qui ne s’identifiaient ni à l’un ni à l’autre. Personne ne nous convenait. Alors nous avons commencé à auditionner les autres jeunes danseurs, avec notre chorégraphe Sidi Larbi Cherkaoui. Soudain, un jeune garçon, Victor Polster, est entré dans la pièce. Il avait toutes les qualités que nous recherchions : un danseur incroyable, très naturel et élégant, âgé de 15 ans. Girl est sa première expérience d’acteur. Pour le rôle du père, nous avons choisi Arieh Worhalter, un acteur qui commence à être connu. Lors de leur audition ensemble, ils m’ont cuisiné un repas. Dès le début, c’était certain qu’il y avait une alchimie entre eux, qu’ils allaient créer la relation dynamique entre un père et son fils qui était nécessaire au film.

Quelles sont vos sources d’influence ?

Les jeunes transgenres que j’ai rencontrés lors de l’écriture du scénario ont été ma source principale d’inspiration. Ils sont tous des héros qui remettent en question les normes de notre société en choisissant d’être véritablement eux-mêmes. 

Que pensez-vous de l’industrie du cinéma en Belgique ?

Le cinéma belge se porte très bien. Je trouve que nous avons des talents formidables qui émergent : Ann-Julie Vervaeke, Leonardo Van Dijl, Nathalie Teirlinck… Et je pourrais en citer plein d’autres ! Une nouvelle vague de jeunes cinéastes est en train de naître et je suis très enthousiaste d’en faire partie. Girl est en français et en flamand, ce qui est très important pour moi. On vit dans un pays divisé par les langues. Je m’identifie comme réalisateur belge et dans mes films, j’aime créer un espace où ces deux langues trouvent leurs places, devant et derrière la caméra.