Mon tissu préféré, le regard de Gaya Jiji

Mon Tissu Préféré - photo du film © FDC

Cinéaste et actrice née à Damas, Gaya Jiji réalise trois courts métrages avant de tourner Mon Tissu préféré. Ce premier long métrage, présenté à Un Certain Regard, conte l'histoire de Nahla (Manal Issa) dans une banlieue syrienne.

Gaya Jiji a reçu le prix Women in Motion au Festival de Cannes en 2016.

Racontez-nous la genèse de votre film

C’est un film très personnel, inspiré de mon vécu et de celui de mes proches.
Au départ, il y avait ce désir de raconter la vie d’une femme syrienne en quête de liberté, puis la guerre éclate et le destin de cette femme se retrouve plus que jamais en miroir de celui de son pays. C’est ce qui a fait naître le film.

L’atmosphère du tournage ?

C’était un tournage très riche, dense et dur à la fois, avec une équipe qui venait des quatre coins du monde et parlait des langues différentes: l’arabe, le turc, le français, l’anglais…
Faire exister ma ville, Damas, dans une autre, Istanbul, était aussi un défi, mais ces contraintes de tournage ont enrichi le film de choix artistiques auxquels je ne pensais pas.

Quelques mots sur vos interprètes ?

Elles ont tout donné, sans limites, elles m’ont permis d’entrer dans leurs univers, comme moi je les ai faites entrer dans le mien. Il y avait beaucoup d’honnêteté et de sincérité dans nos échanges. Elles étaient une de mes sources d’inspiration sur le tournage.

Qu’avez-vous appris durant la réalisation de ce film ?

Le plus intéressant pour moi, c’était comment le passage du scénario au plateau peut bousculer le film. Ce qui est solide dans un script ne le sera pas forcément dans le film. Il se réécrit au tournage puis au montage, il faut avoir la force de détruire et de reconstruire à chaque étape.

Vos sources d’influence ?

Des films comme Belle de Jour de Luis Buñuel et Une journée particulière d’Ettore Scola m’ont accompagnée dans l’écriture, avec la pièce La Maison de Bernarda Alba de Federico Garcia Lorca, qui était une grande source d’inspiration pour dessiner la maison familiale du personnage principal dans mon film.

Quel regard portez-vous sur le cinéma de votre pays ?

Malgré les tentatives de quelques cinéastes de briser la censure, le cinéma syrien est resté prisonnier de l'État, qui est la seule source de financement. Mais je crois fortement à un nouveau cinéma syrien qui va trouver sa place grâce à d'autres moyens et en s'ouvrant vers d'autres horizons.

Pouvez-vous nous parler de votre prochain projet ?

Ce n’est encore qu’une idée. C’est l’histoire d’un immigré syrien au Canada pendant la guerre, sa vie dans ce nouveau pays avec la mémoire de ce qu’il a vécu, et ses souvenirs d’enfance, de jeunesse, de guerre et d’amour.

Ce sera une Odyssée dans la mémoire, à la recherche d’un souvenir perdu ou qu’on a voulu perdre.