Conférence de presse : « Sicko »

Conf Moore2 © AFP

A l’occasion de la conférence de presse de Sicko, présenté en Sélection Officielle, Hors Compétition, le réalisateur américain
Michael Moore a répondu aux questions de la presse internationale. Extraits choisis.

Sur l’éventualité que l’enquête fédérale dont fait l’objet Michael Moore puisse empêcher la sortie américaine de
Sicko :
« On n’a pas encore envisagé cette éventualité. Les Américains ne peuvent pas imaginer qu’on interdise la sortie de mon film, ça serait
totalement absurde. Je ne sais même pas pourquoi le Ministère d’Etat et le Ministère du Trésor, alors qu’ils savaient depuis octobre dernier que je
réalisais ce film, s’en sont pris à moi, dix jours seulement avant ma venue à Cannes. Je souhaitais venir ici calmement, tranquillement, sans donner d’interviews.
Le fait que l’administration américaine ait décidé de porter plainte contre moi juste avant Cannes est une interrogation. Je risque des peines de prison pour avoir fait
ce film et je ne prends pas ces choses-là à la légère. L’administration Bush a peut-être lancé une action judiciaire contre moi pour que le public
américain ne s’intéresse pas à ce film ou parce que nous sommes allés à Cuba. L’idée de départ n’était pas d’aller
à Cuba, mais sur un territoire américain à Cuba, sur la Baie de Guantanamo, pour que des Américains puissent bénéficier des mêmes soins de
santé que les détenus de Guantanamo. Mais nous avons été refoulés de Guantanamo et c’est pour cette raison que nous nous sommes retrouvés à
Cuba. »

Sur la vision enjolivée que donne Michael Moore du système de santé canadien :
« J’entends beaucoup les Canadiens se plaindre de l’attente aux urgences notamment. Or lorsqu’il y a urgence dans les hôpitaux canadiens, on a de l’aide
immédiatement. Le système canadien manque de financements, c’est un problème qui existe depuis une vingtaine d’années. Il n’y a pas de
problème au Canada avec la couverture de santé universelle. Je vois le Canada du point de vue américain. Au Canada, vous avez trois années d’espérance de
vie supplémentaires qu’aux Etats-Unis. Pourquoi la France, les Anglais, l’Europe Occidentale en général bénéficient d’une espérance de
vie plus longue que les Américains ? Pourquoi un bébé qui naît à Toronto a plus de chance d’arriver à son premier anniversaire qu’un
bébé qui naît à Detroit ? Je sais qu’il est difficile de m’entendre dire des choses aussi roses et agréables sur le Canada, mais quoi qu’il en
soit, je pense que si nous avions un système comme le vôtre aux Etats-Unis, nous nous en sortirions mieux. S’il y a des défauts à corriger dans le système
canadien, ce n’est pas à moi de le faire, c’est à vous de le faire. En voyageant à travers le monde et en observant les systèmes en France, au Royaume-Uni,
à Cuba, mon idée était d’aller voir ailleurs ce qui fonctionne bien, de rassembler toutes ces données pour aboutir à un système cohérent
applicable aux Etats-Unis. »

Sur l’absence de confrontation de points de vue dans le film :
« J’ai décidé de faire un film différent de mes précédents. Après Fahrenheit 9/11, je me suis dit qu’il fallait avoir un peu de
respect pour le public qui me voyait à l’écran et qui se demandait si les choses allaient vraiment changer aux Etats-Unis. Et je voulais que le public, après avoir vu
ce film, ait envie de faire quelque chose. Ce film est un appel à l’action. Je n’avais pas envie de donner la parole aux gens qui ne sont pas d’accord avec moi, je
n’étais pas d’humeur à ça. J’avais plutôt envie de présenter mon propre point de vue. »

Sur la genèse du projet :
« En 1999, aux Etats-Unis, j’ai participé à une émission télévisée, “The Awfull Truth”, et on a parlé de
quelqu’un qui était assuré par une compagnie d’assurance. Malheureusement, celle-ci avait refusé de couvrir ses frais de santé et on a fait croire que la
personne en question était décédée. Nous sommes allés faire un reportage sur son faux enterrement. Trois jours après, une fois le film bouclé, la
firme acceptait de couvrir les frais de santé. Je me suis alors demandé si on ne pouvait pas aller plus loin qu’un simple reportage. »

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