Conférence de presse : « Adoration »

A l’occasion de la présentation en Compétition de Adoration, le réalisateur canadien Atom Egoyan, les producteurs Simone Urdl et Jennifer Weiss ainsi que les acteurs Rachel Blanchard, Devon Bostick et Scott Speedman ont répondu aux questions des journalistes. Extraits choisis.

Atom Egoyan sur l’importance d’Internet dans le film :
« Il y a toujours eu ce besoin de se raconter nos histoires. La technologie est simplement un moyen de se les communiquer. Sur Internet, nous sommes saturés par l’intimité des uns et des autres, ça semblait inimaginable il y a quelque temps. Le personnage joué par Devon Bostick est un enfant auquel on n’a pas parlé de l’histoire de sa famille. Il utilise donc la technologie d’Internet, se créant au passage une autre personnalité pour essayer de retrouver cette histoire, pour essayer de se retrouver dans cet espace qui lui est interdit d’accès par son oncle et son grand-père. Il veut ainsi être indépendant, et de cette façon l’histoire parle du voyage intérieur de cet enfant. Il ne s’agit pas vraiment d’Internet dans ce film, mais il s’agit plutôt du fait qu’Internet est un outil qui permet à ce jeune de découvrir ce qu’il a besoin de découvrir sur lui-même et sa famille. Mais finalement ça ne le rapproche pas de ce qu’il cherche. Il n’arrive pas à en savoir plus sur sa famille. Je me préoccupe davantage de la retenue émotionnelle de mes personnages plutôt que de la technologie. La technologie est simplement là pour permettre aux gens d’exprimer, de ressentir ce dont ils sont privés. »

Devon Bostick sur le fait d’avoir été choisi par Atom Egoyan :
« J’ai lu le script juste avant l’audition. Je l’ai trouvé tellement surprenant que j’ai dû le lire plusieurs fois, parce qu’il y avait énormément de choses que l’on pouvait puiser dans ce scénario d’Atom Egoyan. Ce n’est pas juste une histoire. Il y a énormément d’histoires qui se chevauchent. Par une histoire, on en apprend d’autres. Il y a eu ces auditions. Je ne pensais pas pouvoir être choisi et bénéficier de cette opportunité extraordinaire. Une fois que j’ai été choisi, je me suis mis à hurler. Je savais qu’il fallait que je fasse un excellent travail, car ce film allait être vu partout. Les films d’Atom Egoyan sont en effet connus, très importants et j’ai appris quelques leçons en voyant ses autres films. J’étais certes tendu mais j’ai essayé de me comporter le mieux possible. Sur le tournage, j’ai pu rencontrer les différents acteurs, connaître l’environnement. J’ai pu peu à peu m’intégrer à ce contexte, puis après c’est devenu plus tendu avec les monologues. »

Atom Egoyan sur les dangers des nouvelles technologies :
« J’ai l’impression que ma génération vit avec la nouvelle technologie et que cette nouvelle technologie déforme tout. Les gens se cachent derrière Internet. Chacun peut adopter une nouvelle personnalité, car il est facile de se cacher derrière Internet. Et quoi que l’on dise, quoi que l’on fasse, on peut se le permettre parce que la personne avec laquelle on communique n’est pas dans la salle mais à l’autre bout, quelque part en ligne. »

Atom Egoyan sur son intérêt pour les secrets :
« On voit dans le film comment les gens ont partagé leurs secrets, comment ils se sentent de plus en plus à l’aise les uns avec les autres. Et la décision de Tom d’amener Simon dans l’appartement à la fin est un acte de grande générosité. Cela permet à ce jeune de savoir qui était son père. Ces secrets ont été imposés parce que c’était indispensable. Cette famille a des secrets qui sont farouchement gardés, parce que les membres de cette famille souhaitent se cacher derrière une sorte de mythe. C’est dans la nature humaine. Il y a une chose qui me fascine toujours, c’est qu’il est extrêmement mystérieux et difficile de s’approcher d’un autre être humain. Ce n’est pas si simple, il y a beaucoup de films qui semblent montrer que c’est d’une simplicité extraordinaire, mais ce n’est pas le cas. Il faut beaucoup négocier, il y a des questions de confiance, d’intimité. Ca se mérite, ça ne vous tombe pas dessus comme ça immédiatement. C’est quelque chose qu’on peut considérer comme fascinant et c’est pour ça que je l’ai présenté dans le film. »

Atom Egoyan sur l’idée d’Internet comme communauté mondiale :
« Cette idée d’une communauté mondiale, c’est un peu une idée reçue, un cliché. Dans la réalité, ce sont de petits groupes d’intérêts partagés. En fait, ils utilisent une technologie que le grand public n’emploie pas encore. Mais dans les mois et les années à venir, cela va devenir plus fluide. Il y a une scène dans laquelle on voit beaucoup de gens se répondre, participer à un groupe. Je voulais créer une certaine intimité, je voulais montrer qu’en fait il s’agissait de communautés fermées qui interagissent les unes par rapport aux autres. Ce n’est pas quelque chose qui est noyé dans la masse. C’est une histoire intime que je raconte, qui concerne un petit groupe de gens. »