Alexander Payne : « Le cinéma est le miroir le plus juste que nous ayons inventé »

Alexander Payne © FIF/CD

Cinq longs métrages ont suffi à Alexander Payne pour s’imposer comme l’un des réalisateurs majeurs du cinéma américain contemporain. En 2002, Monsieur Schmidt confirmait tout le talent de ce conteur d’histoires régulièrement récompensé pour la qualité de ses scénarios. Sideways (2006) puis The Descendants (2011) remportaient chacun l’Oscar du meilleur scénario adapté. Entretien avec cinéphile passionné.

Qu’est-ce qui vous a poussé vers la réalisation ?
L’envie de devenir réalisateur m’a toujours habité. Mais je viens d’une famille d’immigrés et par conséquent, faire du cinéma n’a longtemps été qu’un songe. Je m’en suis rapproché en procédant par étape. Après l’université, j’ai intégré l’école de cinéma de l’Université de Californie, à Los Angeles (UCLA). C’est à ce moment-là que j’ai su que ma carrière se ferait derrière la caméra.

La formation est-elle une étape indispensable pour un cinéaste ?
Chaque parcours est différent, mais dans mon cas, suivre les cours d’une école de cinéma a été un élément déterminant. J’avais besoin d’évaluer mes capacités à faire des films. Je voulais être certain que mon talent équivalait à l’amour que je leur porte. Au cours de mes six annés d’études à l’UCLA, j’ai réalisé que j’en avais suffisamment pour toucher du doigt mon rêve, et notamment pour faire des comédies, genre vers lequel peu de réalisateurs se tournent instinctivement.

Avez-vous un film fétiche ?
C’est le long métrage d’Akira Kurosawa, Les Sept Samouraïs (1954), qui m’a décidé à intégrer une école de cinéma. Je l’ai découvert lorsque j’étais étudiant en Histoire et en littérature. Quand le film s’est achevé, j’ai pensé que jamais je ne pourrais atteindre un tel niveau de cinéma.

Qu’est-ce qui fait un bon scénario selon vous ?
L’une des choses les plus importantes dans la construction d’un script, ce sont ces flashes d’inspiration qui vous apportent la certitude qu’une idée est la bonne pour faire un film. Ces instants valent de l’or pour un réalisateur, mais aussi pour le public. S’il saisit l’idée, il vous pardonnera plus facilement une scène ennuyeuse ou un casting imparfait. C’est une ceinture de sécurité.

Quelle fonction doit remplir le cinéma selon vous ?
En partant du principe que l’homme a besoin de l’art comme d’un miroir, le cinéma est le plus juste que nous ayons inventé. C’est pour cette raison que le monde entier aime le cinéma. Francis Ford Coppola a dit un jour que lorsque l’homme fait face à une grande difficulté, le cinéma constitue l’une des clés pour trouver une solution. Il nous permet de prendre conscience de ce qui ne tourne pas rond.

Un cinéaste doit-il nécessairement dévoiler une part de lui-même pour donner un sens à son travail ?
Oui, mais pas forcément de manière autobiographique. Cela prend parfois la forme d’une émotion déguisée. S’il y a une scène dans laquelle un cinéaste se retrouve, elle aura forcément un impact sur le public.

Sur quoi travaillez-vous actuellement ?
Je mène des auditions pour un film que je vais commencer à tourner au mois d’octobre. C’est une comédie très modeste en noir et blanc qui raconte le road trip d’un père et son fils. Pour le rôle du père, je viens juste d’auditionner Bruce Dern.

Propos recueillis par BP