Le Rendez-vous des quais, ou la résurrection d’un chef d’oeuvre social

LE RENDEZ-VOUS DES QUAIS © Photo du film LE RENDEZ-VOUS DES QUAIS de Paul Carpita

Censuré en raison des positions politiques de Paul Carpita, cette œuvre magistrale mêlant fiction et documentaire, filmée dans les années 1950 au cœur des mouvements sociaux ouvriers de Marseille, a ressurgi des limbes de l’oubli à la fin des années 1980. Elle est présentée dans sa version restaurée à Cannes Classics.

D’abord censuré, puis perdu et finalement retrouvé avant d’être restauré à la fin des années 1980, Le Rendez-vous des quais fut longtemps considéré comme l’un des pièces manquantes du cinéma français.

Sa saisie « humiliante » par les autorités lors de sa sortie en 1955, « dans l’indifférence totale de la profession et de la critique », ainsi que l’a confié un jour Paul Carpita, a longtemps constitué une douleur indélébile pour ce cinéaste engagé autrefois instituteur, qui possédait sa carte au Parti Communiste et dont c’était le premier film. « Cela a ouvert en moi une plaie profonde qui a été longue à se cicatriser », a-t-il admis avant son décès en 2009.

Tourné entre 1953 et 1955, Le Rendez-vous des quais se déroule sur les docks de Marseille et alentours, où des grèves et des luttes sociales des ouvriers contre leurs conditions de travail très rudes et la guerre en Indochine ont éclaté. Il suit la vie amoureuse et précaire de Marcelle, une ouvrière et de Robert, un docker.

Le film est né de la volonté initiale de Paul Carpita et de quelques camarades du parti d’aller documenter les combats quotidiens de ces mouvements sociaux pour contrebalancer les actualités officielles. Le tournage du Rendez-vous des quais s’est ainsi étalé sur plusieurs mois, au coeur des grèves, avec des acteurs amateurs.

Après la réhabilitation du film, Paul Carpita va reprendre la caméra pour réaliser deux longs métrages de fiction : Les sables mouvants (1996) qu’il avait écrit au même moment que Le Rendez-vous des quais, et Marche et rêve ! Les Homards de l’utopie (2002), dans lesquels on retrouve son amour du réel, des luttes sociales et de la fraternité.