Rencontre avec Mads Mikkelsen, membre du Jury des Longs Métrages

Mads Mikkelsen - Membre du Jury des Longs Métrages © Vincent Desailly / Getty Images

Il surprend, est rarement là où on l’attend. On le pense adepte d’un cinéma confidentiel, il joue le méchant de Casino Royale (2006). En 2012, il remporte le Prix d’interprétation masculine au Festival de Cannes pour le rôle de l’éducateur injustement accusé de pédophilie dans La Chasse (Jagten) de Thomas Vinterberg. En 2013, il donne vie au Michael Kolhlaas d’Arnaud des Pallières, au XVIe siècle. En 2016, l’acteur danois Mads Mikkelsen porte son habit de gala, celui de Juré des Longs Métrages.

Comment abordez-vous votre rôle en tant que membre du Jury des Longs Métrages ?

Je suis très honoré car c’est une chose de faire partie de la Compétition, c’en est une autre de faire partie du Jury… Je suis l’une des neuf voix qui vont s’exprimer. Nous tâchons de nous écouter les uns les autres, de dire ce que l’on a à dire et nous passons un très bon moment. Ils sont attachants, drôles et chaleureux.

Nous avons bien sûr des désaccords mais c’est bien : c’est le meilleur Jury ! Et c’est la première fois que je vois tous les films en Compétition. Ça, c’est fantastique.

Vous jouez souvent les « bad guys », portez-vous un œil de méchant sur les films de la Sélection ?

J’essaie de rester très neutre, de porter un regard de spectateur et non d’acteur. Je ne lis rien sur les films en amont, je ne sais même pas s’ils sont français, allemands ou coréens. Je m’assois dans la salle et j’essaie d’avoir un œil frais, d’oublier que je suis un professionnel. C’est impossible bien sûr mais j’essaie.

Quel cinéma vous enthousiasme?

J’aime tous les styles de films : traditionnels, anciens, réalistes, … En fait, tant que le réalisateur tient un sujet et que le film transmet des émotions, j’adore.

Avez-vous une autre façon de jouer selon que vous jouez en danois, anglais ou même en russe ou en français ?

J’essaie de ne pas être différent. Je joue un personnage mais il y a toujours une partie de moi dans ce personnage. Et si l’on s’éloigne de ma langue, forcément la partie qui me ressemble se réduit. J’essaie d’insuffler quelque chose d’honnête, de donner de la crédibilité à mon jeu, indépendamment de la langue dans laquelle j’interprète. En fait, c’est plus le genre du film qui va orienter mon jeu.

On se souvient de la scène marquante de l’église dans La Chasse de Thomas Vinterberg. Comment vous-êtes-vous préparé pour jouer cette scène ? 

La journée avait été très longue car nous avions tourné pendant dix heures d’affilée. Nous savions que cette scène était un tournant du film, un choix émotionnel, et qu’il fallait qu’il se passe quelque chose dans l’église. Mais nous ne savions pas exactement vers où nous allions. Le moment était bien choisi car on m’avait volontairement isolé et je n’avais pas vu les autres acteurs depuis quinze jours, j’étais donc très déprimé.

Je les retrouve là, dans l’église, la petite fille entre, le chœur de Noël commence, et tout devient soudainement terriblement triste quand je m’assois dans l’église. Puis nous avons répété, trouvé d’autres idées, et nous étions épuisés. Donc, d’une certaine façon, les émotions sont arrivées d’elles-mêmes, même si Thomas Vinterberg avait objectivement écrit une scène fantastique.

Une anecdote sur le Festival de Cannes ?

En 1998, nous sommes venus à Cannes pour la première fois avec Nicolas Winding Refn. On présentait un film au Marché et personne n’était intéressé. On portait même des vêtements d’hiver parce qu’on pensait que Cannes était à la montagne. C’était très compliqué pour nous ! 18 ans plus tard, il est dans la Compétition et je suis membre du Jury. Pour moi ça a été une longue et belle aventure. Il y a vraiment une atmosphère particulière à Cannes, unique.