Rencontre avec Park Chan-wook, membre du Jury des Longs métrages

Park Chan-wook, Membre du Jury Longs métrages © Valery Hache / AFP

Dans la frénésie cannoise, Park Chan-wook détonne. Il s’assoit et, immédiatement, le calme se fait tout autour. Il cherche ses mots, il les trouve en regardant au loin et les restitue avec une douceur infinie. Difficile de deviner que de cet esprit tranquille ont émané Joint Security Area, film de la consécration, ou Old Boy (Grand Prix, 2004) et Thirst, ceci est mon sang… (Prix du Jury, 2009). Mais à y regarder de plus près, il y a quelque chose de particulier dans la violence des films de Park Chan-wook. Une délicatesse, de la tension, du silence.

Trois participations en Compétition, deux prix pour Old Boy et Thirst. Qu’est-ce que Cannes a apporté à votre carrière ?

J’ai été frappé par l’incroyable impact qu’a eu le premier prix que j’ai remporté sur ma carrière. Surtout au niveau international. On peut clairement dire qu’il y a eu un avant Cannes et un après Cannes.

On sait que c’est en voyant Vertigo que vous avez décidé de devenir réalisateur. Mais quels autres films ont accompagné votre carrière ?

Je citerais en premier le réalisateur coréen Kim Ki-young et son film The Housemaid qui m’ont vraiment touché. The Last Witness, réalisé par Lee Dae-yeon. Des réalisateurs également tels qu’Akira Kurosawa, Ingmar Bergman, Luchino Visconti…

Vous avez cité The Housemaid de Kim Ki-young. C’est le film qui vous a inspiré Mademoiselle, remarqué à Cannes l’an dernier. Comment l’avez-vous revisité ?

Je voulais déplacer l’histoire en Corée dans un contexte où le pays était sous occupation japonaise. Cela apporte une différente strate à l’histoire. Les personnages sont d’origines ethniques différentes, les uns coréens et les autres japonais. Ils sont censés être ennemis. J’ai eu l’idée de mettre en scène deux femmes solidaires l’une envers l’autre pour lutter contre l’oppression masculine.

La violence de vos films a quelque chose de particulier. Elle n’est pas aussi sanglante que chez d’autres réalisateurs. Elle est même parfois silencieuse…

C’est sans doute parce que je n’ai pas recours à la violence en tant qu’émotion cinématographique.

« J’essaie d’aborder la violence comme quelque chose d’effrayant, de douloureux, pas comme quelque chose de beau, de cool, qui a une fonction de catharsis. »

Bon nombre de membres de votre famille sont dans le cinéma. Qui vous influence le plus ?

Avant tout mon petit frère. Il a une réelle influence sur mon travail, on travaille ensemble. Il a un profil artistique et m’apporte une approche différente en ce qui concerne la grammaire cinématographique traditionnelle. Il apporte de la fraîcheur et se montre très enthousiaste en ce qui concerne les cultures traditionnelles du Japon et de la Corée. J’apprends énormément de lui.

Park Chan-wook, Membre du Jury des Longs métrages - Cérémonie d'ouverture © Alberto Pizzoli / AFP
Park Chan-wook, Membre du Jury des Longs métrages - Cérémonie d'ouverture © Alberto Pizzoli / AFP

Qu’est-ce que vous aimez voir au cinéma ?

Quasiment toujours des vieux films. C’est pourquoi venir à Cannes est très excitant. C’est l’opportunité de voir beaucoup de nouveaux films dans un même endroit.

Une nouvelle génération de cinéastes coréens émerge. Elle ose, elle explore les genres, comme Sang-ho Yeon et le très remarqué Train to Busan. Vous avez bon espoir pour l’avenir du cinéma coréen ?

La plupart des réalisateurs de cette génération ont été découverts dans des festivals de courts métrages créés par des cinéastes de ma génération. J’y ai moi-même contribué. Voir leurs progrès, de leurs courts à leurs longs métrages, voir la créativité de leur travail est très touchant. C’est une source de fierté pour nous.