Une fiction sur la révolution égyptienne
Dans Après la bataille, Yousry Nasrallah éclaire d’un jour nouveau l’attaque des cavaliers et des chameliers, place Tahrir, le 2 février 2011 dans une œuvre romanesque.
C’est le 9e jour de la révolution égyptienne, et l’image a fait le tour de monde : à cheval ou à dos de chameau, des hommes chargent la foule des manifestants anti-Moubarak place Tahrir. Plus tard dans la nuit, il y a eu un vrai massacre avec des tirs de snipers, mais cet événement a eu un impact médiatique mineur, au regard du premier.
Yousry Nasrallah connaissait certains de ces chameliers et cavaliers, des habitants de Nazlet El-Samman qu’il avait filmé dans A propos des garçons, des filles et du voile, et se refusait à les considérer comme « les salauds de l’histoire ».
Dans Après la bataille, il leur rend hommage en montrant comment le gouvernement a exploité leur colère. Nazlet est en effet un quartier pauvre au pied des pyramides de Gizeh, où les habitants gagnent leur vie en promenant les touristes à dos de chameau. L’Etat qui veut réhabiliter cette zone a fait construire un mur pour les empêcher d’accéder aux touristes et les pousser au départ. Avec la révolution, la situation s’est encore aggravée pour les habitants de Nazlet, privés de touristes, et ils ont commencé à casser le mur. C’est à ce moment que les proches de Moubarak leur ont promis une reprise du travail s’ils les aidaient à chasser les manifestants.
Après la bataille reste toutefois une fiction, dont le fil conducteur est la rencontre amoureuse entre un des cavaliers et une jeune manifestante. Cette dualité de point de vue entre l’homme (du côté du pouvoir) et la femme (du côté de la liberté) était déjà présente dans Femmes du Caire ou Intérieur/extérieur, l’un des dix courts métrages de 18 Jours, présenté l’an dernier en séance spéciale.
On retrouve aussi la marque de fabrique de l’auteur de La Porte du Soleil, qui mêle avec virtuosité l’histoire collective et les destins individuels, le politique et le romanesque.
B. de M.
Le film est projeté au Grand Théâtre Lumière jeudi 17 mai à 12h et 22h30.