CONFÉRENCE DE PRESSE – Abderrahmane Sissako : « Il y a une complexité dans chaque être humain »

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Abderrahmane Sissako et toute l’équipe de Timbuktu, présenté en Compétition, se sont pliés ce jeudi au traditionnel exercice de la conférence de presse. Le réalisateur mauritanien a notamment évoqué la genèse de son film devant une audience attentive, qui l’a longuement applaudi lorsqu’il a fondu en larmes, submergé par l’émotion.
 

Abderrahmane Sissako, à propos de la genèse de son film :
« L’élément déclencheur a été la lapidation d’un couple dans un petit village du Mali. Pas seulement parce que cela a eu lieu, mais parce que personne n’en a pas parlé », a-t-il souligné, déplorant un monde qui devient « indifférent à l’horreur ».

 

Sylvie Pialat, la productrice du film, au sujet de l’intention initiale du réalisateur de tourner un documentaire :
« Tombouctou était encore occupée et il n’était pas envisageable de tourner au Mali pour des raisons de sécurité. Quand la France y est intervenue, nous avons ressenti cette nécessité impérieuse de raconter cette histoire là. On a trouvé très tardivement le pays où tourner, la Mauritanie ».
 

Abderrahmane Sissako, évoquant avec grande émotion la « part d’humanité » des djihadistes :

« Il y a une complexité dans chaque être humain, il y a le mal et le bien. Un djihadiste nous ressemble aussi, mais sa vie à lui a basculé. Celui qui maltraite peut douter. Pour moi, il y a en lui une humanité ».

Abderrahmane Sissako a par ailleurs avoué son « inconfort » sur les plateaux de tournage et sa « peur d’un cinéma esthétisant » :

« On fait face à soixante personnes mais on s’y sent seul. On fait semblant de tout maîtriser et de tout savoir mais il n’en est rien. Le cinéma est un langage que l’on parle avec sa propre intonation. Pour moi, cela signifie chercher à être harmonieux pour mieux faire passer les choses et avoir du recul. C’est facile de montrer l’horreur. J’ai cherché à éviter ça ».

Propos recueillis par Benoit Pavan