UN CERTAIN REGARD – Maryland, rendez-vous avec Alice Winocour

Équipe du film © FDC / M. Petit

Maryland, le second long métrage d’Alice Winocour, parle de la difficulté des soldats à retrouver une vie normale après le traumatisme de la guerre. La réalisatrice a été sélectionnée en 2005 avec Kitchen, pour la Palme d’or du court métrage.

 

Photo du film © DR
 

Racontez-nous la genèse de votre film.
Je me suis intéressée aux photographes de guerre qui parlaient du retour difficile à la vie civile, après avoir côtoyé la mort et les horreurs des combats. J’ai rencontré des soldats qui rentraient d’Afghanistan et qui me parlaient de leurs angoisses, de leurs accès de violence. Tous ces maux que l’on regroupe sous le terme de syndromes post-traumatiques et qui mettent les soldats hors-jeu. Le personnage de Vincent est né de ces rencontres. J’ai imaginé que mon personnage serait un soldat à qui on dit qu’il ne peut pas repartir en opération, comme un ouvrier usé qu’on met à la casse.

J’avais aussi envie d’aller vers un territoire généralement réservé aux hommes, celui du film de genre. Il y a certainement dans mon choix l’idée de réaffirmer que pour les réalisatrices aujourd’hui, « tout est permis ».

L’atmosphère du tournage ?
On a tourné deux mois dans le huis clos du décor, une immense maison d’Antibes, au luxe décadent. Il y avait sans cesse des orages et des tornades, cela donnait une impression de fin du monde. Sur le plateau, l’atmosphère était électrique. Mais même dans les moments de violence, il y avait toujours une excitation collective et contagieuse.

Quelques mots sur vos interprètes ?

J’ai écrit le film pour Matthias Schoenaerts. Il a une animalité qui convenait au personnage, mais en plus de cette condition physique de soldat d’élite, il devait incarner un personnage dans un état limite. Matthias s’est engagé complètement : durant le tournage, il ne dormait plus et était dans un véritable malaise physique. Il est allé très loin vers ses propres démons.
En ce qui concerne le personnage de Jessie, je voulais rendre touchant le personnage mal aimé de la « femme trophée », qui s’est perdue dans une vie superficielle. Diane Kruger a amené beaucoup de vérité au personnage. J’ai toujours été fascinée par son côté hitchcockien.

Quel regard portez-vous sur le cinéma français?
Je me reconnais dans l’énergie collective de la nouvelle génération de cinéastes. Au-delà de la particularité des univers de chacun, j’aime la solidarité qui existe entre nous tous. Nous avons aujourd’hui un devoir de défendre les valeurs fragiles auxquelles nous sommes tous attachés, celles d’un cinéma libre qui s’autorise à aller dans beaucoup de directions.

Vos sources d’influence ?
Les photographes. Pour Augustine, mon premier film, c’était celles de Francesca Woodman, pour ce film, celles de Grégory Crewdson et Philipp Garcia di Lorca. Chacun à leur manière, ils mélangent cinéma d’épouvante et tradition documentaire.

Le film qui a bercé mon enfance, c’est Psychose que j’ai vu une centaine de fois. Mais il y a eu aussi Zabriskie Point, Five Easy Pieces, Stranger than Paradise. En ce moment c’est Abyss de Cameron, dont la puissance de l’histoire d’amour me fascine. Pour Maryland, j’ai vu beaucoup de films d’action, mais je me suis beaucoup inspirée de films d’horreur, en particulier les « Home Invasion Movie ».

 


SÉANCES


Samedi 16 mai / Salle Debussy / 14h00 – 21h30
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