Le Septième Sceau, la mort selon Ingmar Bergman
À l’occasion de sa restauration, l’iconique Det Sjunde Inseglet (Le Septième Sceau, 1957) est projeté à Cannes Classics en hommage à Ingmar Bergman. L’écrivain et metteur en scène Stig Björkman parle de ce grand classique, théâtre d’une rencontre entre le chevalier et la Mort.
Pour vous, Le Septième Sceau est-il le film le plus emblématique de Bergman?
Certainement. Tellement emblématique que des images du film se sont retrouvées estampillées sur des timbres, en Suède et ailleurs ! Et la scène entre la Mort et le Chevalier au bord de la mer a été copiée ou parodiée à maintes reprises par ses plus ardents admirateurs, Woody Allen entre autres.
Mais plus sérieusement, le film représente l’un des travaux les plus sérieux et ambitieux de Bergman. Il est d’une austérité impressionnante. Le sceau du titre fait référence à un passage du Livre de la Révélation et renvoie au silence de Dieu, l’un de ses thèmes majeurs, non seulement dans ce film, mais aussi dans la célèbre trilogie, À travers le miroir (1961), Les Communiants (1962), Le Silence (1963).
Cela n’exclue pas les passages de pure joie. Comme les scènes avec le bouffon et sa famille.
Pensez-vous que Bergman a voulu faire un film sur la peur de la mort?
Bergman était un homme très malin, et son sens pratique était très développé. Je pense donc qu’il existe deux raisons très simples pour lesquels il a choisi et senti qu’il pouvait réaliser Le Septième Sceau.
D’abord, le prix reçu à Cannes pour Sourires d’une nuit d’été (1955) venait de lui offrir une notoriété immédiate en France et au-delà. Cela lui a donné la force de soumettre ce projet assez cher à la Société de production Svensk Filmindustri.
Ensuite, Bergman travaillait en ce temps en tant que directeur de théâtre pour le théâtre de Malmö. Il cherchait une pièce pour les jeunes acteurs du théâtre, et il a écrit Trämålning (Peinture sur bois) pour eux. C’était en substance la même histoire que Le Septième Sceau, et cette pièce transformée en film représenta un super job d’été pour ces acteurs.
Je ne dirais pas que la peur de la mort était inquiétante pour Bergman à ce stade de sa vie. Il était miraculeusement vivant et productif. Il a fait un autre film cette année-là et mis en scène quatre ou cinq pièces de théâtre. La mort est définitivement une grande protagoniste du film mais elle apparaît aussi dans plusieurs de ses films comme Jeux d’été (1951) ou Face à Face (1976), sous forme de prémonition ou de menace, ou d’une femme âgée.
Est-ce votre Bergman favori ?
Non, mais je l’admire pour plein de raisons. Le Septième Sceau avait, bien sûr, une tout autre importance aux yeux de son créateur. « Le film porte sur la peur et la mort. Et il m’a libéré de ma propre peur de la mort », écrivait Bergman. « Le Septième Sceau a toujours été près de mon cœur, je ne peux pas vraiment dire pourquoi. Ce n’est en aucun cas un travail parfait. La production peut être déjantée, et l’on peut sentir qu’il a été fait dans la hâte. Mais je pense que le film n’est pas exagérément inquiet, qu’il est vital et résolu. Et il aborde son sujet avec désir et passion ».