Le Mépris, le poème incandescent de Jean-Luc Godard

Photo du film LE MÉPRIS de Jean-Luc Godard © STUDIOCANAL

Symbolisé par la réplique culte de Brigitte Bardot, dressant devant Michel Piccoli l’inventaire de son corps nu, Le Mépris (1963) est une œuvre à la grâce incandescente qui vient rappeler combien le réalisateur de la Nouvelle Vague s’est attaché à faire valser les certitudes pour s’illustrer là où le cinéma ne l’attendait pas. Le film est présenté à Cannes Classics dans sa version restaurée.

D’À Bout de Souffle (1960) au Livre d’Image (2018), son dernier long métrage – Palme d’or spéciale du 71e Festival de Cannes – d’une carrière en forme de déclaration d’amour aux multiples formes d’art, les films de Jean-Luc Godard n’ont jamais cessé de diviser, de passionner ou d’agacer, de séduire ou de déstabiliser.

Considéré aujourd’hui comme l’un des plus grand films du cinéma français, Le Mépris fut à sa sortie en salles un échec retentissant au regard de son budget, laissant les spectateurs à quai en dépit de la présence à l’écran de l’icône Brigitte Bardot et du cinéaste allemand Fritz Lang dans son propre rôle.

« Le Mépris est devenu un classique absolu. Mais dans les années 1960, seuls deux Godard ont eu du succès : À Bout de Souffle (1960) et Pierrot le Fou (1965) », rappelle le journaliste et directeur de la Cinémathèque Française Frédéric Bonnaud, qui a consacré un documentaire au géant de la Nouvelle Vague. « Le film, au casting duquel figurait quand même l’une des plus grandes stars de l’époque, a été considéré comme un bide. Les gens ne l’ont pas compris ».

« Et mes chevilles ? Tu les trouves jolies mes chevilles ?… Et mes fesses ? Tu les trouves jolies mes fesses ?… ».

Adapté du roman éponyme d’Alberto Moravia paru en 1954, le long métrage met en scène Camille (Brigitte Bardot) et Paul Javal (Michel Piccoli), un couple vivant à Rome. Lorsqu’il est contacté par le producteur Jeremy Prokosch (Jack Palance) pour adapter au cinéma L’Odyssée, Paul voit une opportunité de rassembler la somme qui lui permettra de réaliser son rêve : écrire pour le théâtre et ainsi prouver son talent à sa compagne, quitte à laisser sciemment le producteur américain la courtiser. Mais la jeune femme refuse d’entrer dans son jeu et l’amour qu’elle lui portait se transforme en mépris.

Réflexion raffinée sur le cinéma – en forme de prose sublimée par la musique de Georges Delerue -, sur ses rapports complexes à l’argent et sur la difficulté pour les auteurs à travailler conformément à leurs désirs artistiques, Le Mépris permet à Godard, à qui l’on reprochait alors de ne pas savoir tourner et monter, de prendre sa revanche sur ceux qui s’attelaient à tracer une ligne de conduite au cinéma.

Avec Godard par Godard, le documentaire de Florence Platarets et Frédéric Bonnaud et Drôles de Guerres, son ultime geste de cinéma dévoilé en exclusivité mondiale, le film constitue l’une des trois œuvres projetées par le Festival de Cannes en hommage au cinéaste disparu en septembre 2022.

Une présentation de Studiocanal. Restauration, supervision et numérisation en 4K par Studiocanal chez Hiventy, avec la participation du CNC.