Rencontre avec Brie Larson, membre du Jury des Longs Métrages

© Maxence Parey / FDC

Révélée en 2013 dans States of Grace, de Destin Daniel Cretton, Brie Larson s’est depuis imposée comme l’une des nouvelles figures du cinéma américain. Oscar de la meilleure actrice en 2016 pour son rôle dans l’ingénieux Room, de Lenny Abrahamson, et membre des Avengers à travers ses incarnations récurrentes de Carol Danvers, alias « Captain Marvel », la comédienne, productrice et réalisatrice californienne navigue avec aisance entre cinéma indépendant et superproductions.

Puisque vous venez pour la première fois à Cannes, que pensez-vous de la découverte du Festival ?

C’est complètement surréaliste pour moi. Je fais de mon mieux pour suivre la cadence, je laisse des notes vocales à ma mère le soir pour ne rien oublier. Je pense que je vis un moment charnière dans ma vie. Les rencontres, les films, les délibérations… Il se passe tellement de choses en même temps ! Mes confrères du Jury sont comme une famille désormais.

Qu’est-ce qui vous a donné envie de travailler dans le cinéma quand vous étiez enfant ?

Je ne sais pas vraiment, j’étais si jeune. Mes parents n’étaient pas issus du domaine des arts ou du cinéma, mais j’ai dit à ma mère que c’était ce que je voulais faire. Maintenant que je vis mon rêve, je suis très reconnaissante envers l’enfant que j’étais de m’avoir mise sur cette voie.

Quel film a marqué un tournant dans votre carrière ?

States of Grace (Short Term 12), de Destin Daniel Cretton, a été une bascule pour moi. C’était mon premier rôle principal alors que j’imaginais me cantonner aux seconds rôles toute ma carrière. Cette opportunité m’a fait découvrir une part de moi que j’ai eu envie de partager au public.

 

« Samuel L. Jackson m’a beaucoup appris, que ce soit dans mon travail devant la caméra ou dans la façon de motiver une équipe en plateau. »

 

En tant qu’actrice, quelles sont les collaborations qui vous ont le plus appris ?

L’acteur Jacob Tremblay, avec qui je partage l’affiche dans Room, a joué un rôle déterminant dans ma vie. Je n’aurais pas pu jouer dans ce film sans lui. Il n’avait que huit ans à l’époque mais il était si intelligent, si conditionné. Il ne comprenait pas tout à fait le sens du film donc il ne se laissait pas dépasser par le drame. Après certaines scènes riches en émotions, il pensait que je pleurais pour de vrai et me demandait d’arrêter !

Le réalisateur Destin Daniel Cretton a également changé ma vie par la façon dont il m’a dirigée. Sur le tournage de States of Grace, j’avais une scène de crise de panique, où j’étais sensée me mettre dans un état second. Après la première prise, Destin est directement passé à autre chose, j’ai donc pensé que ma performance avait été décevante. Je lui ai proposé de la refaire, tout en m’excusant, et il m’a répondu : « Non, c’était très bien, je n’ai pas besoin de te voir te torturer davantage. » Il fait preuve de beaucoup d’attention et d’empathie envers ses acteurs, et m’a appris qu’il ne s’agit pas toujours de pleurer ou de crier le plus fort lors d’une scène dramatique.

Il y a également Samuel L. Jackson, avec qui je travaille régulièrement. Il passe tellement de temps à se préparer, à étudier le scénario que lorsqu’il arrive sur le plateau, il a déjà anticipé toutes les façons possibles de jouer une scène. Il m’a beaucoup appris, que ce soit dans mon travail devant la caméra ou dans la façon de motiver une équipe en plateau.

Vous passez de films d’auteurs à blockbusters si facilement. En quoi l’approche est-elle différente en tant qu’actrice ?

Elle ne l’est pas pour moi. Dès le début, j’ai décidé de ne pas changer ma façon de travailler en fonction du type de film. La seule différence réside dans la taille de l’équipe de tournage. Pour le reste, mon travail reste le même.

 

« Réaliser est une façon de m’exprimer selon mes propres termes. »

 

Qu’est-ce qui vous a poussé à devenir réalisatrice ?

J’ai toujours voulu faire partie de l’ensemble du processus de création d’un film. En général, les acteurs ne participent pas aux réunions de production, ils ne voient pas toute la portée des choses. Réaliser est pour moi une façon de m’exprimer selon mes propres termes. Quand j’ai toutes les informations en tête, j’ai l’impression de faire un meilleur travail parce que je sais mieux où je me situe et vers où je vais. Cela m’a aussi fait prendre un peu plus de distance par rapport à moi-même et m’a amenée être plus objective sur mes performances.

Vous reverra-t-on derrière la caméra ?

Bien sûr. J’attends de lire le bon scénario, d’avoir la bonne inspiration. Je n’ai pas de programme prédéfini. Parfois, j’ai l’impression que je peux passer de longues périodes sans rien faire. Lorsque je termine un projet, je fais une pause, je vis ma vie. Cela me remplit de nouveaux concepts, de nouvelles idées qui, selon moi, valent la peine d’être partagées.