Rencontre avec Paul Dano, membre du Jury des Longs Métrages

© Maxence Parey / FDC

Pour lui, tout a commencé en 2001 avec Long Island Expressway, le long métrage de Michael Cuesta dans lequel il affirme avoir « posé les bases de son jeu et de sa carrière », après des débuts remarqués sur les planches, à New York. Depuis, la planète cinéphile a pu apprécier tout le talent de Paul Dano chez Richard Linklater, Paul Thomas Anderson, Ang Lee, Kelly Reichardt ou encore Steven Spielberg. Entretien avec l’acteur américain, membre du Jury des Longs Métrages de la 76e édition.

Nombre de cinéphiles vous associent encore instantanément à votre performance dans The Girl Next Door (2004), de Luke Greenfield. Que représente ce film pour l’acteur que vous êtes aujourd’hui ?

Le rôle de Klitz dans The Girl Next Door est le premier que j’ai décroché à Los Angeles. J’avais 18 ans et j’ai pris beaucoup de plaisir à incarner ce personnage. J’adore que les gens m’associent encore à ce film. Avec le recul, je trouve qu’il est très représentatif de qui j’étais à l’époque. Je me souviens avoir décroché le rôle de Thaddius dans The Ballad of Jack and Rose (2005), le film de Rebecca Miller, pendant ce tournage. J’allais avoir pour partenaire Daniel Day-Lewis ! Cette expérience a donc été très importante pour la suite. Elle m’a prouvé que je pouvais interpréter des rôles très différents et m’a permis de croire en moi.

Ensuite, il y a eu Little Miss Sunshine…

… Pour un rôle qui me correspondait en tous points car je n’ai jamais été un grand bavard ! Sur un plateau, j’ai toujours été très intéressé par tout ce que l’on peut dire sans prononcer un mot. J’aime l’espace entre les mots, le sous-texte entre les répliques. Little Miss Sunshine a été parfait pour expérimenter cela. C’est le film dans lequel j’ai joué qui a le plus impacté la culture populaire. Je réalise maintenant à quel point c’est rare. Ce film est resté dans le cœur des spectateurs d’une manière qui me surprend et qui me rend très heureux.

Quels personnages ont été, ensuite, les plus fondateurs de votre carrière et de votre jeu ?

Tous les personnages que j’incarne viennent nourrir un peu plus la palette de mon jeu car chaque rôle nécessite de s’impliquer différemment. Parfois, il s’agit d’apprendre à jouer du piano ou les codes de la bourse. D’autres fois, il me faut prendre des cours de chant ou apprendre un dialecte. Je ne suis donc pas certain de pouvoir citer un rôle qui m’a davantage fait progresser qu’un autre. Ceci dit, l’un des plus importants du point de vue de l’apprentissage a été celui de Brian Wilson dans Love and Mercy (2014), de Bill Pohlad. M’immerger à ce point dans l’univers de la musique a été une grande joie. Les expériences cinéma que j’ai préférées sont probablement celles qui m’ont permis d’emporter quelque chose avec moi. Love and Mercy a été clairement été l’une d’entre-elles.

 

« Passer derrière la caméra m’a appris à davantage faire confiance au processus auquel je suis confronté en tant qu’acteur. »

 

Qu’est-ce qui vous incite à choisir un rôle ?

Mes choix ont toujours beaucoup dépendu de l’étape de ma vie dans laquelle je me situais, mais aussi du réalisateur, du scénario, du personnage et du défi à relever. Je me pose toujours la question de ce que je peux apporter au film et de ce qu’il peut m’apporter en retour. Ensuite, pour préparer un rôle, je travaille beaucoup autour du scénario et j’entreprends un travail physique si le personnage l’exige. J’essaye en quelque sorte que mon personnage intègre complètement mon corps.

Voyez-vous différemment les propositions de rôles qui vous sont faites maintenant que vous êtes réalisateur ?

Je pense que passer derrière la caméra m’a appris à davantage faire confiance au processus auquel je suis confronté en tant qu’acteur. J’en ai désormais expérimenté toutes les facettes, et ce des deux côtés du miroir. Je pense que cela me permet d’être un peu plus audacieux et courageux sur un plateau. L’expérience de Wild Life (2018), mon premier long métrage, m’a permis de prendre encore davantage conscience de l’importance des moindres détails. Et que les acteurs peuvent apporter beaucoup à un film.

La dernière fois que vous êtes apparu à l’écran, c’était dans The Fabelmans (2022). Qu’est ce que Steven Spielberg a-t-il de si unique ?

Je ne peux pas vraiment l’expliquer. Il possède indéniablement quelque chose de magique qui lui est propre. Il a sa façon bien à lui de voir le monde et de le transformer en magie cinématographique. Il a vraiment mis son cœur sur la table pour The Fabelmans. Son père est décédé huit mois environ avant notre première rencontre. C’était donc un film très personnel et très émouvant pour lui. Et il n’y a rien de mieux que d’entendre Steven dire « coupez, plan suivant ! ». La façon dont il le dit est tellement unique ! Toute sa magie réside dans son intuition. Il est très intuitif et émotionnellement intelligent. Il déborde littéralement de cinéma.

Vous reverra-t-on prochainement derrière la caméra ?

Je suis en pleine écriture. C’est la partie la plus difficile et c’est celle qui me prend le plus de temps. Ce ne sera probablement pas pour l’année prochaine, mais peut-être davantage pour l’année suivante si mon calendrier me le permet. Nous verrons bien. Mais c’est certain, j’ai déjà hâte d’y être.