Une nuit, le regard d’Alex Lutz
C’est la première fois qu’Alex Lutz présente un film en Sélection officielle en tant que réalisateur. Il y a deux ans, l’acteur, scénariste et réalisateur français était au casting de Vortex de Gaspard Noé, présenté à Cannes Première. Avec Une nuit , sélectionné à Un Certain Regard, il raconte la passion dévorante et éphémère de deux inconnus, lui-même et Karin Viard, dans les rues de Paris.
Comment vous est venue l’idée d’Une nuit ?
Il y a quelques années dans le métro, j’ai vu une femme bousculer un homme en se projetant dans la rame, déclenchant entre eux une dispute bruyante. Leurs arguments ne manquaient pas de charme ni d’intelligence, comme s’ils se savaient observés. On sentait comme une attraction entre ces deux personnes qui s’invectivaient.
Arrivé chez moi, j’ai écrit quelques lignes : une retranscription de la scène qui s’était déroulée sous mes yeux, puis, avec un jeu d’ellipse, ces deux mêmes personnes faisant l’amour dans un Photomaton. J’aimais l’idée d’une joute verbale prolongée, d’une errance nocturne qui me paraissait intéressante pour ce couple improvisé.
Quelle était l’ambiance sur le plateau de tournage ?
Nous n’avons quasiment pas tourné de jour, ce qui est rare. La nuit est un autre temps, sans sonneries de portables, sans la vie diurne des bureaux… C’est une autre pulsation.
Nous voulions absolument tourner sur un temps court, créer un film en danger dans sa fabrication, je voulais que l’urgence soit perceptible à l’écran : le temps est tragiquement compté pour le personnage féminin, il fallait qu’il le soit pour nous aussi.
Quelques mots sur vos acteurs ?
Il fallait que l’héroïne soit interprétée par Karin Viard, je n’aurais pas fait ce film sans elle. Karin est une amie, on ne passe pas notre vie ensemble mais lorsqu’on se retrouve on est immédiatement très honnêtes l’un envers l’autre, comme nos personnages. On se connaît, on se comprend, on ne fait pas de manières, et c’est aussi ce qui nous a donné envie de nous lancer ensemble dans ce projet.
Le film profite aussi de la présence de Jérôme Pouly de la Comédie Française, qui est toujours formidable, et de Noémie de Lattre, une amie chère dont j’adore le travail, et qui est en recherche artistique permanente à travers tout ce qu’elle fait.
Qu’aimeriez-vous que les gens retiennent de ce film ?
J’aimerais que mon film soit une ode à l’amour, même si l’amour n’est pas une chose simple et évidente, au contraire : on se fait mal, on trébuche, on recommence. C’est un travail, une démarche, une volonté de s’apporter de l’amour. Le couple est avant tout une expérience humaine. C’est un chantier en danger permanent, et c’est ce qui le rend passionnant et beau.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de devenir réalisateur ?
J’avais envie de raconter des histoires, c’était une prolongation et la suite logique de ce que je faisais déjà depuis des années au théâtre où j’ai toujours écrit, joué et mis en scène. Il y avait aussi mon amour des interprètes, mon envie de les faire jouer.