Viva Varda !, un glanage de Pierre-Henri Gibert

Photo du film VIVA VARDA ! de Pierre-Henri Gibert © Alain Ronay/1970 cine´-tamaris

Dans Viva Varda !, Pierre-Henri Gibert remonte avec passion le fil de la carrière singulière d’Agnès Varda pour rappeler à quel point, cette personnalité aussi âpre que généreuse du cinéma, profondément féministe, a su prendre son destin en main pour tracer son chemin en s’affranchissant des diktats de son époque. Jusqu’à devenir un modèle. Le documentaire est présenté à Cannes Classics en présence du réalisateur, de Rosalie Varda et de Mathieu Demy.

Pour quelle raison avez-vous choisi de consacrer un documentaire à Agnès Varda ?

Agnès Varda s’est beaucoup raconté à la fin de sa vie, avec, comme souvent pour les créateurs, une extension de la fiction à son propre récit. Elle s’est présentée sous une image consensuelle, loufoque mais un peu lisse et n’était pas toujours la mieux placée pour proposer un regard critique sur son propre travail. En parlant avec ceux qui l’ont côtoyée et en m’immergeant dans son œuvre, dans ses court-métrages, dans ses documentaires, dans ses photos, j’ai compris que la réalité était plus extraordinaire encore. Plus je découvrais Agnès antagoniste, complexe et multiple, plus elle me passionnait. Ensuite, il m’a fallu trouver un récit qui embrasse cette richesse et cette complexité.

Comment avez-vous préparé le film ?

J’ai très vite rencontré Rosalie et Mathieu, ses enfants. Je ne savais pas jusqu’où ils étaient prêts à aller. Ce n’était pas forcément évident pour la famille d’accepter que quelqu’un d’extérieur vienne construire un récit qui serait forcément subjectif. Je crois qu’ils ont compris que mon travail était bienveillant et que cette bienveillance permettait d’aborder sa personnalité et son parcours avec lucidité.

 

« Une piste m’a semblé essentielle : montrer le destin vraiment exceptionnel qui a été le sien. »

 

Quelle a été votre ligne directrice ?

Une piste m’a semblé essentielle : montrer le destin vraiment exceptionnel qui a été le sien. Elle avait un tempérament qui était parfois abrasif, mais qui démontrait une détermination hors-norme. Elle avait une capacité à nager à contre-courant et à continuer à créer contre vents et marées qui force l’admiration. Je pense que même si, à la fin de sa vie, elle a pu jouir d’une remarquable reconnaissance, c’est quelqu’un qui a été longtemps sous-considérée, qui a vraiment dû se battre pour imposer ses projets. Dès les années 50, elle a tout mis en œuvre pour suivre son désir. Ce qui a été passionnant, c’est d’évoquer sa personnalité dans sa richesse, sa complexité, et en même temps proposer une vision globale qui ne se résume pas seulement à ses longs métrages.

Vous n’occultez rien de ce qui était sa personnalité…

Elle avait un sacré tempérament qu’il ne fallait pas édulcorer. Les phrases chocs qu’elle a pu dire électrisent le récit du film. C’est très réjouissant. Quand tout a été monté, je me suis concentré sur la partie consacrée à Jacques Demy en me disant que si je ratais cette partie, qui est un arc dramatique essentiel, je ratais le film.

D’où proviennent les archives que vous avez utilisées?

Il y a évidemment les archives très précieuses de Ciné Tamaris. Rosalie et Mathieu nous ont ouvert les malles de la famille. J’ai aussi retrouvé beaucoup d’archives de l’INA et de témoignages. C’est quelqu’un qui a été très couvert médiatiquement et qui s’est beaucoup confiée, mais ces archives ont été peu utilisées. C’était absolument formidable de pouvoir les exhumer. Elle était dans le contrôle mais je suis allé glaner, de-ci, de-là, des petites choses qui lui ont échappées, je pense, et qui font sens. Il y a aussi beaucoup d’archives inédites provenant de la radio, et notamment de Radio Canada. Le dernier élément, ce sont les films eux-mêmes. J’ai tenté de proposer un regard subjectif sur les films en évitant les longs extraits et en les montant de manière un peu impressionniste. Sur la base de tous ces matériaux, j’ai essayé de construire un récit fluide.

Une coproduction Cinétévé, Ciné-Tamaris, ARTE France. Avec la participation de Ciné +, du CNC, de la PROCIREP – société des producteurs et de l’Angoa. Distribution Cinétévé Sales/MK2 Films.