Le Scénario de ma vie : les lettres inédites de François Truffaut
Truffaut a encore tant à nous dire à propos de lui, de la vie, de l’enfance, de nous… Presque quarante ans après sa mort, le réalisateur phare de la Nouvelle Vague se raconte dans Le Scénario de ma vie, François Truffaut, un documentaire de David Teboul basé sur des écrits inédits du cinéaste. Ce film hommage sera projeté à Cannes Classics en présence du réalisateur et de son co-auteur, Serge Toubiana.
« Le Scénario de ma vie » était l’ultime projet de Truffaut. Comment l’avez-vous exploité ?
Grâce aux filles de François Truffaut, Laura et Eva, j’ai obtenu l’autorisation de me servir de lettres et de correspondances. Mais j’ai surtout travaillé sur une matière inédite : le dernier témoignage que François Truffaut avait confié. Il avait eu toute sa vie le souhait d’écrire son autobiographie et avait pensé le faire après la mort de ses parents. Comme il les avait beaucoup blessés après Les 400 Coups, il n’avait pas cessé de reporter ce projet. Son ex-femme, Madeleine Morgenstern, chez qui il a habité les derniers mois de sa vie, lui avait proposé de s’y remettre. J’ai travaillé sur ce matériau constitué d’entretiens que Truffaut avait donnés à son ami de jeunesse, Claude de Givray. Leur but était de rédiger cette autobiographie, qui allait s’intituler “Le Scénario de ma vie”.
Comment raconter François Truffaut en y apportant une nouvelle dimension ?
C’est un documentaire à la première personne. Truffaut revient sur son enfance et sur les trente premières années de sa vie. J’ai travaillé sur le lien entre ses films et les correspondances pour construire le film sous un angle intime.
Diriez-vous que le cinéma a été une thérapie pour lui ?
Très tôt, c’est par le cinéma qu’il a pu réparer des traumatismes d’enfance qu’il ne vivait pas comme tels. Il était extrêmement solaire. C’est un être plus complexe et plus touchant que ce qu’il donne à voir en façade. Et au fond, très tôt, le personnage d’Antoine Doinel nous appartient. Donc il y a aussi chez Truffaut la volonté de dépasser le cadre intime pour créer un personnage qui appartienne à tous.
C’est un film sur l’amour aussi, et le manque d’amour…
C’est un film à la fois tendre et joyeux. Truffaut est un amoureux de l’amour. Il y a une dimension romanesque chez lui, et même l’histoire de ce géniteur qui serait juif, ça ressemble à un film qu’il aurait pu faire. J’ai vraiment voulu parler d’un Truffaut du sentiment. Au fond, son œuvre repose sur l’enfance, le couple, la passion et j’ai essayé d’aborder tous ces thèmes en les associant à sa propre vie.
Qu’est-ce qui vous touche personnellement dans la personnalité de François Truffaut ?
C’est le reste d’enfance, ce regard très enfantin sur des sujets extrêmement graves. J’ai toujours l’impression qu’il fait les choses pour la première fois. Et puis, il y a un double chez Truffaut, c’est une question très importante pour ne pas passer à côté de son personnage. C’est-à-dire qu’il y a une forme de violence des sentiments. C’est tout sauf lisse. Et quand ça semble lisse, ça ne l’est pas du tout. Mais c’est un être profondément amoureux de la vie et c’est assez rare pour quelqu’un qui a traversé ce qu’il a vécu.