Niki, le regard de Céline Sallette

NIKI © Photo: Julien Panié © 2024 - Cinéfrance Studios - Wild Bunch - France 2 Cinéma - Onzecinq

Révélée dans L’Apollonide : Souvenirs de la maison close de Bertrand Bonello, présenté en Compétition en 2011, Céline Sallette figure aujourd‘hui parmi les actrices phares du cinéma français de ces dix dernières années. Sa présence à la fois nonchalante et déterminée transparaît, entre autres, dans le récent Les Algues Vertes de Pierre Jolivet. Niki, biopic sur Niki de Saint Phalle présenté au Certain Regard, est sa première expérience derrière la caméra.

 

Comment vous est venue l’idée de ce portrait ?

Après avoir vu une interview de Niki de Saint Phalle datant de 1965. Je remarque alors deux choses : la première, c’est une artiste brillante et très en avance sur son temps. La seconde : Charlotte Le Bon lui ressemble de façon très troublante. Le film m’est apparu. La transformation de la jeune femme mannequin, pur produit de son époque, en artiste aux cheveux courts coupés au couteau qui tire avec une carabine pour créer un tableau. Comment Niki Mathews devient Niki de Saint Phalle ? Alors que j’expose le dossier à mon agent et que nous prenons rendez-vous chez un producteur, Jalil Lespert l’appelle : il veut réaliser un film sur Niki de Saint Phalle avec Charlotte Le Bon ! Quand il apprend que j’ai la même idée, il propose qu’on se rencontre et l’histoire est lancée.

 

Comment avez-vous abordé le tournage ?

Je voulais que le plateau soit le plus léger possible malgré la reconstitution de l’époque (années 50/60). Victor Seguin, mon chef-opérateur, a été d’accord pour se lancer dans le projet sans machinerie ni projecteurs. On avait une caméra, un pied et on allait vite. On n’avait pas de scripte ni de maquilleuse, Charlotte se maquillait quand elle voulait. On a tous aimé le dynamisme et la rapidité qu’induisait ce dispositif.

 

 

« Niki survit avant de renaître. »

– Céline Sallette

 

Comment avez-vous choisi vos interprètes ?

Bien sûr il y a Charlotte et la bravoure avec laquelle elle s’est emparée de Niki. J’ai tout aimé d’elle à chaque instant, j’ai été émerveillée. John Robinson et Damien Bonnard sont, chacun à leur façon, des figures masculines très progressistes. Judith Chemla et ceux qui composent la bande des Nouveaux Réalistes avaient en charge le formidable élan de liberté qui montre à Niki le chemin. Je voulais un mélange de vrais artistes comme John Fou, Pablo Tomek et d’acteurs touche-à-tout comme Quentin Dolmaire ou Virgile Bramly. Les figures sombres qui croisent le chemin de Niki étaient aussi un enjeu majeur.

 

Quel souvenir gardez-vous de la réalisation de ce film ?

J’ai appris chaque jour. Ce qui m’a le plus touché, c’est de voir à quel point un film est le résultat d’une intelligence collective. Toutes les personnes engagées dans la fabrication du film étaient passionnées et créatives. J’ai personnellement été portée par la très belle confiance que m’accordaient mes producteurs et mes partenaires au plateau. Le film se trouve toujours dans cet espace entre le fantasme et la matière. C’était beau de le voir prendre vie.

 

Quel effet souhaitez-vous que le film procure aux spectateurs ?

J’espère que le film permettra de sentir que, du silence au cri de la révolte, il y a un chemin. J’espère que cette poésie transformatrice irrigue le film. Pendant des mois j’ai lu, écouté, étudié des témoignages d’inceste et ça m’a bouleversé. Camille Kouchner, Charlotte Pudlowski, Christine Angot, Neige Sinno et tant d’autres… Depuis cet enfer, Niki survit avant de renaître. Elle est un exemple.