Dis pas de bêtises : l’hommage de son fils à Pierre-William Glenn

DIS PAS DE BÊTISES

Véritable lettre d’amour d’un fils à son père, le documentaire de Vincent Glenn, Dis pas de bêtises, se penche sur la relation qu’il a tissée avec son père, célèbre chef opérateur de la Nouvelle Vague. Dans ce document touchant, dévoilé à Cannes Classics, Pierre-William Glenn est de tous les plans, au crépuscule de sa vie.

Comment a germé l’idée d’un film avec lui, et non pas sur lui, comme vous le soulignez ?

C’est un faisceau de raisons. D’une part, nous n’avions jamais entrepris de voyage ensemble, nous n’étions jamais partis tous les deux. D’autre part, cela fait trente ans que je fais des films, et lui a une carrière riche de plus de 80 longs métrages. Il a fait Série noire d’Alain Corneau (1978), Coup de torchon de Bertrand Tavernier (1981), la lumière des films de Truffaut, le cadre pour les films de Losey… Et pourtant, nous n’avions que très rarement travaillé ensemble. L’idée n’était pas tellement de faire un film sur sa carrière — je me disais que d’autres le feraient très bien —, mais plutôt de réaliser un film ensemble, que l’on soit complémentaires dans sa fabrication.

Comment a-t-il joué le jeu ?

Il a accepté d’être l’acteur de son film, comme un deuxième cerveau. J’aimais bien l’idée qu’il soit le sujet principal du film. On a suivi le flot d’une écriture filmique et documentaire en évolution, en se laissant la possibilité de scénariser des scènes. C’est un film très organique, réalisé au diapason de son énergie. L’idée était vraiment de fabriquer un film ensemble. Pour une fois, il était devant la caméra, et moi derrière. Qu’avions-nous à raconter ensemble ?

C’est un film de complicité : c’était une belle surprise pour vous ?

Oui. En réalité, le film parle de nous. Quand il parle de la relation avec son père, il parle aussi de nous… Il y avait entre nous une distance sur laquelle, encore aujourd’hui, je jette un voile pudique. Il y a eu de vrais désaccords : il a nourri une forme d’amertume, car s’il a brillé en tant que chef opérateur, il n’a pas eu la reconnaissance qu’il souhaitait en tant que metteur en scène. De mon côté, j’ai vite été consacré en tant que réalisateur de documentaires. Il y avait quelques non-dits à ce sujet. Ce n’était pas une filiation facile : il avait une certaine dureté, héritée d’une vie, d’un abandon. Je le suggère dans le film, mais cela reste pudique.

En quoi ce film vous a-t-il réconciliés ?

C’était une façon pour moi de retrouver une forme de communication après des années de silence. Le cinéma a été un facilitateur, qui nous permettait de nous retrouver en nous disant les choses, en en faisant quelque chose. Quand on a tourné, il était très affaibli, suite à son AVC, donc il y avait cette tentation de lui remonter le moral. Je joue ce rôle-là tout au long du film. S’il y a un message, c’est bien celui-ci : il n’est jamais trop tard pour retrouver une forme de tendresse, une forme d’amour qui arrive à se dire.