Le cinéma à vif de Bo Widerberg par Jon Asp et Mattias Nohrborg

Bo Widerberg fut d’abord un écrivain, critique du conservatisme cinématographique de son temps, avant de devenir, à partir des années 1960, l’un des fers de lance d’un nouveau réalisme en Suède. Récompensés à Cannes, Raven’s End (1963), Elvira Madigan (1967) ou encore Ådalen 31 (1969) témoignent de son style viscéral, inspiré de Truffaut, Cassavetes ou encore Fellini, tout en restant profondément ancré dans la culture ouvrière suédoise.

Avec I Huvudet På Bo, Jon Asp et Mattias Nohrborg nous entraînent bien au-delà de la simple biographie filmée, dans les lieux fondateurs de son imaginaire : Malmö, sa ville natale, les forêts de Småland, mais aussi Paris et Cannes. Autant de paysages qui ont nourri sa quête d’un cinéma libre et réaliste, en réaction au classicisme d’Ingmar Bergman.

À travers des images d’archives rares, des extraits de tournages et les témoignages précieux de ses proches, mais aussi de cinéastes contemporains comme Ruben Östlund, Olivier Assayas ou Mia Hansen-Løve, le film recompose la trajectoire tourmentée d’un artiste animé par la passion. Widerberg y apparaît comme un cinéaste fougueux, toujours ouvert aux accidents créatifs, fidèle à ses acteurs et à la vérité émotionnelle de ses récits.

Le documentaire révèle aussi un homme en perpétuelle contradiction, souvent au détriment de sa vie personnelle : il montre combien la quête artistique de Bo Widerberg affecta profondément sa famille et ses collaborateurs. Asp et Nohrborg rendent un hommage sensible à ce cinéaste complexe et audacieux, passionné et impulsif, dont la fougue créatrice, souvent à contre-courant, côtoya des blessures personnelles.