Domingo et la brume, le regard de Ariel Escalante Meza

Photo du film DOMINGO Y LA NIEBLA (DOMINGO ET LA BRUME) de Ariel ESCALANTE MEZA © Incendio Cine

Ce n’est pas la première fois qu’Ariel Escalante Meza est impliqué dans un film en Sélection officielle. Il y a douze ans, le costaricain apparaissait au générique du court-métrage Los minutos, las horas, de Janaína Marques Ribeiro, en tant que monteur. Cette année il propose un long métrage, Domingo y la niebla (Domingo et la brume), qui aborde le thème du deuil et de la vie après la mort.

Comment vous est venue l’idée de Domingo et la brume ?

J’ai traité du thème du deuil dans tous mes précédents films. Le fait que les humains aient besoin d’associer des fantômes aux morts m’obsède.

En revanche, je n’ai jamais tenté d’explorer « l’autre monde » dans mes précédents films. Domingo et la brume apparaissait alors comme l’opportunité idéale de plonger dans une expérience cinématographique tournant autour de la vie après la mort, comme une chance poétique d’imaginer la voie prise par les « revenants ».

 

Quelles sont vos méthodes de travail ? Quelle était l’ambiance sur le plateau de tournage ?

On a beaucoup improvisé et on était flexibles sur tout : nous savions que si nous ne pouvions pas tourner la scène que nous voulions, nous allions penser à autre chose, quelque-chose de même meilleur que l’idée de base.

Les acteurs ne lisaient jamais le scénario. Nous avons travaillé ensemble dans les moments les plus importants de chaque scène et très vite ils ont improvisé les dialogues.

J’ai ressenti tout ça comme un jeu ou une soirée. Nous avions fait en sorte que le plateau ressemble à un concert de punk-rock : gérer l’adrénaline, le contrôle de soi et le sentiment que nous étions en train de changer le monde, scène par scène.

 

Quelques mots sur vos acteurs ?

L’idée m’est venue de mélanger acteur professionnels et amateurs au début du tournage. J’ai senti que les émotions transmises par le film pouvaient venir de la technique, mais qu’elles devaient également provenir d’expériences de vie authentiques. Je voulais aussi que naisse une sorte de rivalité entre acteurs professionnels et amateurs, pour que ressorte des scènes un conflit plus qu'une harmonie : des gens issus de milieux différents et devant gérer ensemble un problème commun.

 

Qu’aimeriez-vous que les gens retiennent de ce film ?

J’aimerais qu’ils retiennent que pour faire du cinéma authentique, l’inspiration doit venir de la rébellion, comme pour n’importe quelle autre forme d’art. On doit nager contre le courant, être capable de prendre des risques, d’accepter le chaos. On doit aussi être préparé à l’échec.

Un film, en tant que média, a un potentiel de transformation social très fort et irrépressible.

 

Quel est votre film culte ?

Probablement Memories of Underdevelopment (Mémoires du sous-développement) du grand réalisateur cubain Tomás Gutiérrez Alea. La première fois que je l’ai vu, il m’a laissé sans voix, je ne pouvais plus bouger de ma chaise.

Pour moi, c’est le film punk ultime : basé sur le concept marxiste de l’affrontement, du conflit, il est fait de collages de styles cinématographiques nous emmenant dans un voyage qui n’a jamais été fait avant. Il transporte ce sentiment à la fois de rigueur et d’extrême liberté. On a l’impression que le réalisateur fait absolument tout ce qu’il veut avec le langage cinématographique.