Rencontre avec Kristen Stewart, membre du Jury des Longs Métrages

Kristen Stewart © Mike Marsland/Getty Images

 

Il y a quelque chose d’à la fois solaire et ténébreux chez Kristen Stewart. Actrice insaisissable, révélée dans le monde entier par la saga Twilight, elle s’est imposée comme icone rebelle du cinéma au parcours sans faute. Autant adulée du grand public que saluée par la profession, Kristen Stewart a su marquer Cannes de son empreinte par trois fois en Compétition, dans Sur la route de Walter Salles avant de briller chez Olivier Assayas dans Sils Maria et Personal Shopper. L’an dernier, le Festival a accompagné les premiers pas de l’actrice derrière la caméra avec Come Swim, court métrage lancinant, poignant.

Le Festival de Cannes, Olivier Assayas, un César, Chanel… n’êtes-vous pas Française finalement ?

Presque ! Je m’en approche le plus possible. Je vais jouer Jean Seberg dans Against All Enemies de Benedict Andrews et une grande partie de mes répliques est en français, même si elle avait un sacré accent. Je dois donc apprendre encore plus, ça va être drôle !

Vous avez pu vous plonger dans le cinéma français ?

Pas autant que je le devrais. J’ai vu de nombreux films mais je ne me considère pas nécessairement comme cinéphile. Mon expérience personnelle est incroyable parce que j’ai littéralement l’impression de suivre des cours de cinéma. Il y a dans le cinéma français des personnalités à la fois très différentes, très éloquentes et éclairées. Ce sont des professeurs en quelque sorte.

Olivier Assayas dit que vous avez inventé un espace de liberté dans le métier d’acteur. Qu’est-ce que vous en pensez ?

C’est lui qui m’a prodigué cet espace. J’ai joué dans cinq films dans lesquels je me suis sentie tout sauf libre… Je pense que cet environnement qui crée quelque chose d’inattendu, c’est en fait le fruit de beaucoup de préparation, d’un esprit brillant qui sait quelles personnes rassembler et s’assurer que tous les éléments sont compatibles. Une fois que tout ça est établi, ça crée un espace dans lequel vous pouvez perdre le contrôle.

Quand je travaille avec Olivier Assayas, honnêtement, on ne parle même pas de ce qu’on va faire, on ne raconte pas forcément la même histoire mais, d’une manière ou d’une autre, on finit par se retrouver.

Je ne cherche pas à impulser une émotion spécifique, je n’ai pas l’impression qu’il attende que j’accomplisse quelque chose en particulier. C’est une manière singulière de travailler et c’est bien, même si je préfère qu’on me tienne la main ou qu’on me tende un filet de soutien pour y tomber.

Dans Personal Shopper, votre performance efface le genre, c’est très particulier, vous pourriez être un homme…

C’est parfait car la mort du frère de mon personnage est tellement présente ! C’est comme si elle voulait être lui, être plus proche de lui pour qu’il ne lui manque pas. J’aime son ambiguïté, on ne sait jamais qui elle est vraiment car elle-même ne le sait pas.

Vous pourriez incarner un homme ?

Carrément ! Le genre, c’est un mythe pour moi. C’est à chaque individu de définir son propre rapport au genre. Je pense qu’il y a tellement de flexibilité dans cette question, qu’il y a un espace pour chaque manière de voir les choses.

Kristen Stewart

Kristen Stewart © Pierre Suu/Getty Images

Quel est le rôle de vos rêves ?

J’ai beaucoup de mal à définir ce que je veux faire en tant qu’actrice. Et je tiens à ne pas le savoir. C’est toujours une surprise. Je n’ai pas envie d’intervenir en amont du film… Enfin, je ne produirai jamais de film, je le promets. Je ne lancerai jamais une compagnie de production. Je veux écrire et réaliser. Et jouer pour les gens qui écrivent et réalisent.

Votre premier court métrage, Come Swim, a été présenté au 70e Festival de Cannes. Qu’avez-vous tiré de cette expérience ?

Pour être honnête, ce film a clos un chapitre. J’ai senti une sorte d’éveil. Ce que j’en ai tiré, c’est que j’ai une putain d’envie de faire des films ! Parce que ça fait du bien, parce que c’est le meilleur moyen de saisir quelque chose, de mettre le doigt sur quelque chose, mais aussi de réunir des gens qui ressentent la même chose. Les films peuvent éduquer, nous réunir, combler des fossés, nous faire sentir moins seuls. À la fin de Come Swim, je me suis sentie pleinement accomplie.

De quoi sera-t-il question dans votre premier long métrage ?

J’adapte des mémoires, The Chronology of Water, de Lidia Yuknavitch qui vient de Portland. J’adore ses romans mais ses mémoires sont profondément personnelles. Je l’ai dans la peau et je le savais déjà avant de la rencontrer. Je tourne le film cet été mais avant ça, mes seuls objectifs, c’est de terminer le scénario et trouver une actrice spectaculaire parce que je vais écrire le meilleur rôle féminin du monde ! Je vais écrire ce rôle que j’aurais vraiment aimé jouer.