Conférence de presse : « Le Silence de Lorna »

A l’occasion de la présentation en Compétition du Silence de Lorna, les réalisateurs belges Jean-Pierre et Luc Dardenne, le producteur Denis Freyd ainsi que les acteurs Arta Dobroshi, Jérémie Renier, Fabrizio Rongione et Alban Ukaj ont répondu aux questions des journalistes. Extraits choisis.

Jean Pierre Dardenne sur leurs intentions : « Ce qui nous a intéressés, c’est de raconter l’histoire d’êtres humains, en Europe occidentale, qui viennent d’ailleurs, Lorna principalement et Sokol, et comment ils arrivent – par des manières qu’on ne peut pas saluer – à obtenir ce qu’ils pensent être leur part de bonheur. Nous avons voulu que cette Lorna reste un être humain, avec sa part d’ombre, ses paradoxes et son silence. Mais c’est un beau silence, car il va, si je puis dire, « accoucher » de quelque chose…

Luc Dardenne sur la manière de filmer : « Nous avons une caméra beaucoup plus calme, car on voulait regarder Lorna. Pour la regarder, il ne s’agit pas de bouger avec elle, de vouloir être dans son énergie. On voulait plus enregistrer qu’écrire avec notre caméra. »

Les comédiens sur le travail avec les réalisateurs :
Arta Dabroshi : « Travailler avec Jean-Pierre et Luc a été un très grand plaisir. Nous avons d’abord répété pendant un mois et demi. Pour des acteurs, c’est le paradis, car chaque jour, nous découvrions de nouvelles facettes du personnage. »
Alban Ukaj : « Souvent, les réalisateurs veulent nous servir d’exemple. Ici, c’était le contraire. Les acteurs étaient invités à faire des propositions, et eux puisaient en nous. C’était très agréable. A un moment, je me suis concentré sur mon rôle comme si je travaillais pour le théâtre. »

Luc Dardenne sur le travail à deux : « Nous parlons beaucoup pour faire le scénario. Puis nous faisons le casting nous-mêmes, tous les deux. Sur le plateau, nous travaillons d’abord très longtemps avec les acteurs, et personne d’autre autour de nous. Après, quand on sent que le plan est presque là, on appelle le caméraman, le directeur de la photo, l’ingénieur du son, éventuellement le chef décorateur. Et là, un de nous deux se retire et va regarder le moniteur vidéo et devient silencieux. Une fois qu’on a fait une prise, mon frère et moi parlons devant ce moniteur. Généralement, il n’y a personne avec nous à ce moment-là. Puis celui qui s’occupe du plan va parler aux autres collaborateurs. Ensuite nous sommes présents tous les deux au montage et au mixage. Ce n’est pas plus compliqué que d’être seul, c’est peut-être même plus simple pour nous, sinon nous n’aurions pas continué… »

Jean-Pierre Dardenne sur les différences entre Lorna et les personnages de leurs précédents films :

« Avant de commencer le scénario, on s’est donné une ligne de conduite : si on veut écrire une histoire qui est dans la même famille que celles que nous avons déjà racontées, il faut que le personnage ait une autre trajectoire. On savait que ce serait une femme, on savait de quel fait divers on allait partir, mais on savait aussi que son cheminement devait être différent de celui des personnages précédents. Même si, dans chacun de nos films, les personnages deviennent plus humains à la fin. C’est encore le cas de Lorna, mais différemment. »