Conférence de presse : « Maradona par Kusturica »

Les deux protagonistes de Maradona par Kusturica, présenté Hors Compétition, se sont retrouvés en salle de conférence à 15h30 pour répondre aux questions de la presse internationale. Morceaux choisis.

Diego Maradona sur la liberté d’expression :
"Lorsqu’on devient très connu, on n’a plus le droit de s’exprimer sur rien. On ne peut plus parler des Etats-Unis, ni de Bush par exemple. Emir Kusturica m’a donné ce respect que tout être humain mérite : même si je suis un joueur de foot, j’ai le droit d’avoir un avis sur quelqu’un que je considère comme un assassin. Ce film, nous l’avons présenté comme nous l’entendions. Je peux m’exprimer librement et, par mon intermédiaire, le peuple argentin aussi ; de la même façon qu’Emir exprime parfois la manière de penser de son pays. Nous ne sommes pas tous obligés de penser comme les Etats-Unis. Nous avons tous le droit à la liberté."

Diego Maradona sur la drogue :
"Cela n’a pas été un problème d’évoquer la drogue. J’y ai survécu pour pouvoir le raconter ici. C’est bien de pouvoir se lever tous les matins, de pouvoir parler à ses filles, de vivre le foot de manière différente… J’ai abandonné toutes mes sales habitudes. Maintenant, j’ai une vie plus posée qu’avant. Je peux désormais profiter de chaque instant."

Emir Kusturica sur le sens de son documentaire :
"Ce film n’est pas simplement un manifeste politique. Je voulais projeter certaines de mes idées sur le monde, tout en gardant à l’esprit la carrière de Maradona. Ce que j’avance appartient au sens commun, à l’évidence. Mes vraies déclarations politiques sont beaucoup plus fortes que celle-ci."

Emir Kusturica sur son amitié avec Maradona :
"Sur le plan philosophique, nous sommes tous les deux des disciples de Dionysos. Nous appartenons à la vie où le chaos fait partie de l’énergie. Nous n’appartenons pas à ce monde très rationnel, réglé par l’économie. Nous aimions ce monde ancien où le chaos maintenait l’équilibre psychologique général."

Diego Maradona sur la sincérité du film :
"Nous nous sommes ouverts l’un à l’autre. Nous nous sommes raconté nos histoires et, à partir de cet échange, nous avons pu construire le film. On a raconté beaucoup d’histoires horribles à mon sujet. Seul Emir a été capable d’entrer en mon for intérieur et de raconter les bons comme les mauvais moments. Nous avons fait ce documentaire en ouvrant nos cœurs, en profitant d’une liberté d’expression que beaucoup de gens dans le monde ne disposent pas. Je n’ai pas aimé les autres films sur moi pour la simple raison que je n’avais pas mon mot à dire. Il n’y avait que l’avis du réalisateur, je ne me sentais pas concerné, ce n’était pas moi qui racontais ma vie. Dans le film d’Emir, tous les éléments nécessaires sont présents pour qu’on puisse comprendre qui est Maradona, qui est Diego, qui est son fils, qui est son père, qui est ce joueur de foot, puis ce drogué miraculé. Je considère le film d’Emir comme mon film ! Il n’invente rien, il raconte les choses telles qu’elles sont, car c’est moi qui les raconte."

Emir Kusturica sur son omniprésence à l’image :
"Il y a une raison à cela. Il y a des moments où je ne pouvais pas trouver Diego à Buenos Aires. En l’absence du héros, j’ai dû prendre sa place. Sans moi, le film n’aura pas pu se faire." (rires)

Emir Kusturica sur sa fascination pour un autre joueur de football :
"Il y a un joueur contemporain que je considère comme un héros, c’est Zinedine Zidane. C’est l’un de mes joueurs préférés. Je ne vais pas faire un film sur lui, mais c’est quelqu’un qui m’a toujours impressionné. C’est le contraire de Diego, car on ne voit pas sa technique. Diego, c’était le magicien qui faisait son dribble ; personne ne pouvait savoir de quel côté il allait passer."