COMPÉTITION – Alice Rohrwacher, quand fiction et réel s’entremêlent

Remarquée à Cannes en 2011 pour la sensibilité de sa mise en scène, cette jeune cinéaste italienne rompue à l’exercice du documentaire présente Le Meraviglie, sa deuxième fiction. Un film qu’elle s’est attachée à ancrer dans la réalité.

Interrogée sur son rapport à la caméra, Alice Rohrwacher a un jour décrit ce « mélange de peur et d’attraction » qui l’anime. Un sentiment contrasté permettant toutefois d’éclairer les intentions narratives de cette réalisatrice de trente-trois ans dont Le Meraviglie est le second long métrage. Tourné dans un style aux accents néo-réalistes affirmés, Corpo Celeste, son premier film, révélait en 2011 toute l’aptitude de la jeune femme à nuancer son point de vue. Corpo Celeste mettait également en lumière son penchant prononcé pour une narration délicate au contact de ses personnages, laissant transparaître à l’écran sa sensibilité.

Photo du film © DR

L’ambition première d’Alice Rohrwacher reste toutefois d’apporter un regard le plus clairvoyant possible sur son sujet. Issue du documentaire, la réalisatrice entretient une relation forte avec le réel et son environnement sonore, qu’elle prend soin de ne jamais travestir. Son cinéma privilégie l’observation et s’efforce de se tenir visuellement à distance des situations explicitant son propos, laissant ainsi au spectateur le choix de ses opinions. « Selon moi, il faudrait protéger un cinéma qui suit un procédé créatif offrant un point de vue spécifique sur la réalité« , argumente-t-elle. « Les formes hybrides, à mi-chemin entre documentaire et fiction, sont très intéressantes et représentent le futur de la narration« .

Le Meraviglie conte le quotidien bouleversé d’une famille d’apiculteurs vivant en autarcie. Au travers de cette histoire, la cinéaste a souhaité aborder la question de la destruction des identités régionales en Italie et les difficultés rencontrées par ses territoires reculés, « dont la pureté n’est qu’une prison dans laquelle elles se sont enfermées pour sauvegarder leur intérêts économiques« .

Au générique de Le Meraviglie figure sa sœur, l’actrice Alba Rohrwacher, mais aussi Monica Bellucci, qui interprète une animatrice de télévision. « Ce film est également né de mon observation de familles dans lesquelles triomphaient des femmes, en bien ou en mal« , explique la cinéaste. Pour donner davantage de corps à son œuvre, la réalisatrice a invité son équipe de tournage et ses acteurs à participer à la construction de son décor. « Les liens ainsi créés, même s’ils sont invisibles, peuvent imprégner les images comme une poussière magique et se voir dans le film« , analyse-t-elle.

Benoit Pavan

SÉANCE

Dimanche 18 mai / Grand Théâtre Lumière / 16h30
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