SÉANCE SPÉCIALE – Samuel Benchetrit : « Il y a eu un moment de grâce entre Isabelle Huppert et Jules »

Équipe du film © Getty Images / D.Charriau WireImage

Les Chroniques de l’Asphalte ou le quotidien de Charly, adolescent de région parisienne, en cinq livres. Ligne après ligne, une cité se dessine, avec ses blocs et ses hôtes. Entre les lignes, c’est l’adolescence de Samuel Benchetrit qui prend forme. Dix ans après la parution du premier tome, l’écrivain réalisateur replonge dans ses souvenirs d’enfance avec Asphalte. Entretien.

 

Samuel Benchetrit © DR

Qu’est-ce qui vous a poussé à l’adaptation cinématographique ?
C’est une vague interprétation. En fait, je me suis servi de toutes petites choses du livre. J’ai surtout eu envie de raconter la banlieue autrement, ce que le livre fait. Aujourd’hui, on parle beaucoup de banlieue dans des termes un peu violents. J’avais envie d’y retourner tout simplement.

Vos livres racontent votre banlieue dans les années 1980. Quel écho peuvent avoir vos histoires aujourd’hui ?
Je trouve ça intéressant de voir comment c’était il y a 25 ans pour essayer de comprendre ce qui se passe aujourd’hui. Les cités HLM sont très marquées par les années 1980. J’ai filmé dans cette cité qui a été construite dans les années 1970 qui a été détruite après le tournage.

Le fléau, c’est la solitude. C’est une question d’abandon, on est abandonné à la naissance. Ce qui m’attriste, c’est qu’on n’entend jamais parler de la solidarité que j’ai connue dans ces quartiers. Les gens se confondent, se parlent. Aujourd’hui, je vis dans un immeuble parisien et je ne retrouverai jamais ça.

J’aime bien cette histoire aussi dans le film : il y a un bruit qui se balade, un petit son qu’entendent tous les personnages. On se rend compte que c’est une porte qui claque mais chacun y va de sa petite légende. Et les légendes urbaines ne peuvent naître que dans des endroits abandonnés. On croit encore aux fantômes dans ces quartiers. J’en ai l’impression en tout cas.

 

Photo du film © DR

Cette cité, justement, est-ce qu’elle ressemble à l’environnement dans lequel vous avez vécu ou bien avez-vous imaginé tout à fait autre chose ?
Elle ne ressemble pas à la cité où j’ai vécu. Dans mon cas, c’était un ensemble d’immeubles avec des systèmes de barres, c’était beaucoup plus grand. Tourner dans de vraies cités que j’aurais repérées était très compliqué parce qu’il y a des gens qui y vivent. Je cherchais un immeuble désaffecté parce que je n’avais pas les moyens de tourner en studio. J’avais envie d’être inspiré par un ciel de l’Est, pas trop au Nord, ni au Sud. Il a fallu que je m’habitue à cet immeuble parce que j’étais trop marqué par les paliers et les escaliers de mon enfance.

Votre fils, Jules, interprète Charly dans le film. Comment avez-vous travaillé avec lui ?
Assez simplement. Au début, je ne voulais pas lui confier le rôle parce que ça me faisait peur puis je voulais lui foutre la paix. En fait, il était merveilleux, puis il connaît mon travail. Il a un âge qui m’intéresse beaucoup qui est l’adolescence et qui m’échappe. J’ai envie que ça m’échappe joliment. Surtout, il y a eu un moment de grâce entre Isabelle Huppert et Jules. Ils sont tout le temps ensemble dans le film et il s’est vraiment passé quelque chose entre eux qui ne m’appartient pas du tout. Ils ont beaucoup travaillé, il partait travailler avec elle et je les dirigeais ensemble. J’ai compris que Jules était un acteur, il a très vite compris son personnage.

 

 

Entretien réalisé par Tarik Khaldi

 

 

SÉANCE


Dimanche 17 mai / Salle du Soixantième / 19h15

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