Le quatorzième jour, chef d’œuvre yougoslave de Zdravko Velimirović

Photo du film Dan Četrnaesti (Le quatorzième jour) © DR

 

Le quatorzième jour, en référence aux 14 jours de permission dont bénéficient les quatre protagonistes du film de Zdravko Velimirović, à l’époque plus permissive de Tito, chef de gouvernement de l’ex-Yougoslavie. En Compétition au Festival de Cannes 1961, le film, qui suit les différents parcours de ces quatre personnages, est présenté en version restaurée à Cannes Classics. Le fils du réalisateur, Mladen Velimirović, évoque l’œuvre de son père.

Comment votre père réagirait-il s’il savait qu’il était à Cannes Classics, soixante ans après que son film a été sélectionné au Festival ?

Je pense que mon père serait touché que son film ait une nouvelle vie. Il disait que Le quatorzième jour avait été très bien reçu à Cannes. Mon père s’y était rendu avec son ami de longue date, le scénariste et romancier Borislav Pekić (Petrović), ainsi que les acteurs principaux du film.

Cette édition 1961 était particulièrement glamour, avec la présence d’Henri Colpi, Luis Buñuel, René Clément, Sophia Loren, Alain Delon, Gina Lollobrigida…

« Mon père signait là son premier long métrage, il avait à peine trente ans et il était déjà sélectionné dans l’un des meilleurs festivals au monde. »

Quelle place avait Le Quatorzième jour dans sa filmographie?

Diplômé de l’IDHEC en 1957 à Paris, il avait déjà réalisé plusieurs documentaires, mais comme je l’ai dit, Le Quatorzième jour était son premier long métrage et ce premier film a été sélectionné à Cannes. Il représentait les Balkans et l’ex-Yougoslavie avec fierté, avec une certaine influence française car, après ses études parisiennes, il resta toujours lié au monde culturel international, et en particulier français.

 

Comment était-ce de diriger un film dans les années 1960 en Yougoslavie?

Le cinéma yougoslave est une richesse culturelle et selon Mr Tomislav Gavrić, critique et auteur d’une monographie sur mon père, celui-ci a introduit d’autres manières de filmer dans ce pays.

Le quatorzième jour était considéré comme esthétique, humaniste, et c’était aussi le premier film politiquement suggestif et critique de Yougoslavie, car il évoque la vague d’emprisonnements politiques qui a eu lieu sous Tito. Ceci dit, il y avait aussi beaucoup de choses positives en Yougoslavie. Tout au long de sa carrière, mon père explora avec tolérance et passion les traditions, l’humanité et surtout toute connexion entre bonté et beauté. Il cherchait la beauté innée de chacun. Je partage le point de vue de Mr Gavrić et d’autres critiques : les films de Zdravko Velimirović seront revalorisés car ils témoignent d’un exceptionnel héritage culturel yougoslave.

 

Il était professeur en plus d’être metteur en scène : comment était-ce de grandir aux côtés d’une telle personnalité ?

C’était passionnant, sa vision, ses connaissances et son inspiration étaient incroyables. Ma mère Ranka Velimirović, productrice et réalisatrice, était d’un grand soutien également, elle a encouragé mon père à se concentrer sur des œuvres artistiques ambitieuses. Après sa mort, elle réalisa deux documentaires sur sa vie. Ma sœur Milica Velimirović et moi-même, sous l’influence familiale, sommes également réalisateurs. Comme Zdravko était aussi professeur, il invitait parfois ses étudiants de l’université à la maison pour échanger et les guider sur leurs projets : beaucoup d’entre eux sont devenus des metteurs en scènes à succès. L’élite culturelle venait également, acteurs, réalisateurs, écrivains, peintres, et je restais toujours près d’eux, absorbé par les passionnantes discussions menées par mon charismatique de père.