Le Retour : entretien avec Catherine Corsini

LE RETOUR © Emmylou Mai - CHAZ Productions

Pour sa troisième participation en Compétition, Catherine Corsini revient à ses racines. Elle nous emmène en Corse, sur les pas de Khédija, qui travaille pour une famille parisienne aisée. Chargée de s’occuper des enfants pendant les vacances, elle en profite pour emmener ses filles sur sa terre natale chargée de souvenirs, l’île de Beauté, un pays d’exploration et d’aventures pour les adolescentes.

Comment est née l’idée de ce film ?

Je voulais faire un film qui parle de la jeunesse d’aujourd’hui. Pour cela, j’avais besoin d’une jeune scénariste pour être au plus juste. J’ai rencontré Naïla Guiguet, qui sortait de la Fémis, et avec qui j’ai travaillé pendant trois ans sur ce script. L’idée du cadre de la Corse est venue tout de suite. Ensuite, est apparu progressivement tout ce qui me liait à cette île, une grande partie de mon histoire familiale, que je résistais à évoquer. C’est pourquoi le chemin a été long. Mais les petits ruisseaux ont fini par se rejoindre pour faire cette histoire.

Pourquoi était-il important pour vous de venir tourner en Corse ?

Je suis coupée en deux. La Corse est ma part manquante car je n’y ai pas été élevée à cause de la mort de mon père qui est survenue quand j’avais deux ans et demi. C’est comme un trou béant, et revenir dans son village était fort, vibrant. Je ne pensais qu’au cinéma, dans lequel je sais qu’il aurait voulu travailler.

On retrouve le brillant Cédric Apietto au casting de ce film, parmi d’autres acteurs insulaires. Quel regard portez-vous sur le cinéma corse ?

Évidemment, le cinéma corse s’incarne dans les films de Thierry de Peretti qui m’impressionnent toujours beaucoup. J’ai repris beaucoup de ses acteurs, dont Cédric, que j’ai trouvé humainement magnifique. Il a apporté son écoute, son charme, sa justesse et sa voix.

Qu’est-ce qui vous a donné envie de tourner à nouveau avec Aïssatou Diallo Sagna après La Fracture ?

Aïssatou a dès le départ été associée à cette histoire. C’était une histoire de famille et à mes yeux, par sa douceur et son humanité, elle incarnait parfaitement la mère. Elle était auréolée d’un César mais je sais combien la profession peut être oublieuse et je tenais à faire savoir que moi, je ne l’oubliais pas.

Qu’est-ce que la Corse vous a offert de particulièrement cinématographique ?

Tout est cinématographique en Corse. Cette île est impressionnante, chaque décor apporte une tension, une force. Il y a la Corse touristique et la Corse des montagnes, plus secrète et parfois oppressante. C’est un pays à conquérir. Mon père était très pauvre, mais je sais qu’il avait une grande noblesse de cœur et un sens de l’amitié, de l’hospitalité. Des valeurs que partagent mon ami cinéaste Pierre Salvadori. Aujourd’hui, je parle avec des nationalistes de la première heure qui sont inquiets par les dérives identitaires. C’est un pays toujours en contraste.