Ma Loute, le délire burlesque de Bruno Dumont

Photo du film Ma loute © R. Arpajou (c) 3B

Deux ans après la tornade P'tit Quinquin, le réalisateur explore la comédie sociale burlesque et remonte le temps : direction l'année 1910 et le Pas-de-Calais, où se joue une histoire d'amour fantaisiste sur fond de mystérieuses disparitions.

Remarqué pour le propos spiritualiste de son cinéma, Bruno Dumont a pris en 2014 le contre-pied de sa réputation avec P'tit Quinquin, mini-série comique à l’esthétique réjouissante. Le succès critique de sa comédie policière chez les Ch'tits a encouragé le réalisateur à creuser de nouveau ce sillon, cette fois au travers d'un objet cinématographique burlesque, bouillonnant de genres poussés jusqu’à leur démesure.

De retour sur la Côte d’Opale, Bruno Dumont met en scène l'histoire d'amour entre Ma Loute Brufort, un fils de pêcheurs soupçonnés d'anthropophagie, et Billie Van Peteghem, une bourgeoise androgyne issue d’une famille décadente.

Le cinéaste a volontairement dérèglé le verbe de ses personnages, qui dynamitent un film pétri de répliques plus absurdes les unes que les autres, où la bourgeoisie est égratignée. Le pouvoir comique de Ma Loute repose également sur la gestuelle de ses acteurs, bien (mal) aidés par le lieu du tournage du film, qui a contribué par sa météo et physionomie à caricaturer leurs déplacements.

« Grossir le trait jusqu’au grotesque »

« Je grossis le trait jusqu’au grotesque, à la recherche de cette fonction cathartique que le cinéma semble avoir un peu perdu quand il en vient au divertissement pur », explique le cinéaste. Bousculades et glissades jalonnent ce film dont l’âme a été inspirée à Dumont par de vieilles cartes postales de l'époque. Le réalisateur, qui a bouclé le tournage de Ma Loute en quarante-cinq jours, a songé un temps à tourner le film en noir et blanc pour retrouver leur grain.

Le film met en scène plusieurs acteurs confirmés du cinéma français, au premier rang desquels Juliette Binoche, Fabrice Luchini et Valeria Bruni-Tedeschi. Une première pour Dumont, qui ne s’était jusqu’alors jamais appuyé sur des comédiens professionnels en dehors de Camille Claudel 1915 (2013), où apparaissait à l'écran la seule Juliette Binoche.