7 visions de l’amour portées au grand écran

Depuis ses débuts, le cinéma vit une idylle passionnée avec l’amour. Les cinéastes ont constamment nourri une fascination pour les nuances complexes de ce sentiment universel, et s’emploient à en traduire toutes les facettes, des plus familières aux plus troublantes. Témoin privilégié de cette relation intime, le Festival de Cannes a présenté, au cours de son histoire, des œuvres qui ont redéfini et sublimé cette alliance entre le cœur et la caméra.

Explorez 7 films emblématiques de la Sélection qui, chacun à leur manière, portent un regard singulier sur l’amour.

1
« Il Gattopardo » – « Le Guépard » de Luchino Visconti (1963)
Affiche du film Il Gattopardo © DR
Claudia Cardinale, Burt Lancaster - Il Gattopardo (Le Guépard) © STAFF / AFP

 

En 1963, Luchino Visconti signe l’un des plus grands chefs-d’œuvre du septième art avec Le Guépard. L’adaptation du roman éponyme de Giuseppe Tomasi di Lampedusa explore les liens complexes des relations humaines au sein de la noblesse sicilienne déclinante du XIXe siècle. Soucieux de préserver le prestige aristocratique de sa famille, le prince Don Fabrizio Corbera (Burt Lancaster) consent à marier son neveu Tancredi Falconeri (Alain Delon) à Angelica Sedara (Claudia Cardinale), héritière de la bourgeoisie montante. Dans son film, Visconti magnifie la puissance intemporelle de l’amour et des liens humains, qui deviennent des clés pour comprendre le passé, appréhender le présent et envisager l’avenir : « Il faut que tout change pour que rien ne change. » (Tancredi Falconeri, joué par Alain Delon). Le Guépard fait un triomphe sur la Croisette, et reçoit la Palme d’or à l’unanimité.

 

2
« Un Homme et une Femme » de Claude Lelouch (1966)
Affiche du Film Un homme et une femme
Claude Lelouch, Pierre Barouh, Anouk Aimée, Jean-Louis Trintignant - Un Homme et une Femme © STAFF / AFP
Claude Lelouch - Un homme et une femme © Mathilde Petit / FDC

 

Avec Un Homme et une Femme, Claude Lelouch célèbre la ritournelle de l’amour. Le réalisateur plonge dans l’intimité délicate et tumultueuse de deux âmes qui s’entremêlent et parvient à capturer l’éphémère et le permanent de cette relation. À Deauville, entre éloignement et retrouvailles, Anne (Anouk Aimée) et Jean-Louis (Jean-Louis Trintignant) trouvent l’amour et la rédemption malgré leurs passés douloureux. Le film se déploie comme une ode intemporelle, un chabadabada, une mélodie envoûtante qui résonne au-delà de l’écran. Chaque regard échangé, chaque geste devient, sous la direction du réalisateur, une symphonie amoureuse. Auréolée de la Palme d’or en 1966 (ex-æquo avec Signore e SignoriCes Messieurs Dames de Pietro Germi), l’œuvre s’érige en une éclatante célébration de la passion.

« J’avais envie de faire le portrait d’un homme et d’une femme tels que moi je les imaginais : deux êtres au-dessus du monde dans lequel ils vivent. Des gens qui savent faire la part des choses en permanence, qui sont constamment dans les nuances et à aucun moment dans les excès. C’est un film sur le juste milieu, Un Homme et une Femme. Le juste milieu m’a toujours fasciné et j’avais envie de faire un film sur le juste milieu d’un couple. » Claude Lelouch (source)

 

3
« La Maman et la Putain » de Jean Eustache (1973)
Affiche du film La Maman et la Putain © DR Films du Losange
LA MAMAN ET LA PUTAIN © films du losange / Photo Bernard Prim Collection Christophel
LA MAMAN ET LA PUTAIN © films du losange / Photo Bernard Prim Collection Christophel

 

« Elle était belle comme le jour. Mais j’aimais les femmes belles comme la nuit. »

En 1973, La Maman et la Putain est présenté à Cannes et fait scandale. Jean Eustache, son réalisateur, se révèle en avance sur son temps, défiant les conventions cinématographiques de l’époque. Avec un langage cru et sans filtre, il explore les complexités des relations amoureuses et des désirs humains. Il se penche sur les relations entremêlées d’un triangle amoureux, où Alexandre (Jean-Pierre Léaud) tente de concilier son désir d’une relation stable avec Marie (la Maman, Bernadette Lafont) et son aspiration à donner un sens à sa vie avec Veronika (la Putain, Françoise Lebrun). Cette œuvre, emblématique pour toute une génération, reçoit le Grand Prix spécial du Jury sous la présidence d’Ingrid Bergman et exerce encore aujourd’hui une influence durable sur le cinéma contemporain, inspirant des réalisateurs tels que Harmony Korine, Gaspar Noé ou Olivier Assayas.

« C’est l’histoire d’une tentative d’amour collective totalement dysfonctionnelle, mais tellement juste dans son moindre détail que ça en devient éternel, hors du temps. » Gaspar Noé (source)

« Mon premier film, mon tout premier film avait beaucoup d’idées, comme tous les premiers films. […] Cela fait dix ans. Le temps a passé. J’ai pratiquement pensé à renoncer au cinéma […] Et puis, j’ai décidé de nouveau à en faire. Et j’ai considéré ce film, « La Maman et la Putain » comme mon premier film, comme si je n’avais rien fait auparavant. J’ai eu envie de dire énormément de choses, d’un seul coup, comme on fait pour un premier film, c’est-à-dire en vrac, bric-à-brac, comme ça, sans schématiser, sans styliser. » Jean Eustache (source)

 

4
« Wild at Heart » – « Sailor et Lula » de David Lynch (1990)
Affiche du film Sailor et Lula © DR
David Lynch - Sailor et Lula, Palme d'or 1990 © Jacques Demarthon / AFP
Willem Dafoe, Diane Ladd, Isabella Rossellini, David Lynch, Nicolas Cage - Wild at Heart (Sailor et Lula) © Gérard Julien / AFP

Sailor et Lula, ou l’histoire d’un amour fou et brûlant entre deux jeunes paumés américains lancés dans une cavale semée de rencontres inquiétantes pour fuir la mère jalouse et psychopathe de Lula. Pour son cinquième long métrage, David Lynch adapte le roman « Wild at Heart: The Story of Sailor and Lula » de Barry Gifford et assure avoir voulu réaliser un conte de fées…

Très impliqués dans leur rôle, le couple incarné par Laura Dern et Nicolas Cage part en week-end à Las Vegas pour tisser des liens essentiels à la création de leurs personnages. À la fin du tournage, Nicolas Cage offrira sa veste en peau de serpent devenue culte à sa partenaire de plateau ! (Source)

Ce road-movie déjanté, noir et sensuel qui se voit décerner la Palme d’or du Jury présidé par Bernardo Bertolucci à Cannes en 1990, a ancré dans nos mémoires l’un des couples les plus mythiques du cinéma. Love me tender, Love me Sweet !

5
« Basic Instinct » de Paul Verhoeven (1992)
Jeanne Tripplehorn , Michael Douglas, Sharon Stone - Basic Instinct © Michel Gangne / AFP
Affiche du film Basic Instinct © DR

 

En 1992, le thriller sulfureux Basic Instinct de Paul Verhoeven ouvre le Festival de Cannes. Dans cette œuvre, les frontières entre l’amour, la séduction et le danger s’estompent, pour laisser place à une exploration des aspects les plus sombres et ambigus de la passion amoureuse. Michael Douglas interprète l’inspecteur Nick Curran, qui enquête sur un meurtre impliquant Catherine Tramell (Sharon Stone), une romancière énigmatique au passé trouble. Leur relation complexe évolue vers un jeu dangereux où la sexualité se transforme en une véritable arme de manipulation.

« J’ai toujours été attiré par les rôles ambigus, auxquels on peut s’identifier. Dans Basic Instinct, mon personnage est pris dans une telle spirale à cause d’un adultère que chaque spectateur se demande ce qu’il aurait fait dans cette situation impossible. » Michael Douglas (source)

 

6
« In the Mood for Love » de Wong Kar-Wai (2000)
Affiche du film © DR
Tony LEUNG Chiu-Wai, Prix d'interprétation masculine - In the Mood for Love © Tony Barson Archive / Getty Images

 

Présenté en Sélection officielle et en Compétition en 2000, In the Mood for Love de Wong Kar-Wai transporte le spectateur dans le Hong Kong des années 1960. Ce film offre une méditation profonde sur la solitude, le désir et les affinités électives. Tony Leung Chiu-Wai – récompensé par le Prix d’interprétation masculine – et Maggie Cheung incarnent avec grâce deux voisins réunis par la découverte de la liaison entre leurs conjoints respectifs. Derrière sa caméra, Wong Kar-Wai, aux côtés de Christopher Doyle (Directeur de la photographie), capture les non-dits, l’inexprimable et l’indicible, érigeant chaque instant en un tableau poétique rythmé par une bande sonore envoûtante. Son exploration de l’intimité capture la beauté mélancolique et la nostalgie de l’émoi amoureux avec une puissance émotionnelle rare.

« Je ne raconte pas l’histoire d’une liaison, mais une certaine attitude à un moment de l’histoire de Hong Kong, et comment les gens ressentent cela. Je pensais que l’histoire d’une liaison pouvait être très ennuyeuse, car il y a eu tellement de films sur le même thème. Il n’y a pas de gagnant dans une liaison. J’ai cherché un angle différent. Il me semblait plus intéressant de voir ce récit à travers le prisme d’une époque passée, et le rapport des personnages à leur histoire au fil des années. Ils gardent ce secret, et ce secret me semble le thème le plus intéressant du film. » Wong Kar-Wai (press kit – extraits d’un entretien réalisé à Cannes le 21 mai 2000 par Michel Ciment et Hubert Niogret pour Positif)

 

7
« Titane » de Julia Ducournau (2021)
Affiche du FIlm
Julia Ducournau © John Macdougall / AFP
Agathe Rousselle, Julia Ducournau et Vincent Lindon - Titane © Andreas Rentz / Getty Images

 

Titane de Julia Ducournau explore les frontières entre l’attraction et la répulsion, la tendresse et la brutalité. Ce film de genre raconte la rencontre entre deux solitudes, Alexia (Agathe Rousselle), une danseuse accidentée mutique et Vincent (Vincent Lindon), un pompier à la recherche de son fils Adrien, disparu depuis 10 ans. Julia Ducournau dépeint cette connexion émotionnelle comme une force indomptable, capable de transcender les limites du corps et de l’esprit. La danse, omniprésente dans le film, devient le langage visuel qui exprime la puissance de lien paternel et élève l’amour au-delà des mots et des gestes. Avec ce second long métrage, Julia Ducournau est la deuxième réalisatrice à remporter la plus haute distinction du Festival de Cannes lors de la 74e édition du Festival.

« Dans mon cheminement, il est question d’aller toujours plus loin, d’éviter la redite. J’essaie de creuser dans ce qui me paraît le plus impossible d’exprimer. D’ailleurs, c’était le cas pour Titane. Je m’étais rendue compte après Grave qu’il m’était compliqué de parler d’amour frontalement. J’ai donc essayé d’en parler à ma manière, en faisant ressentir plutôt que de dire. Ça a été un très gros challenge. » Julia Ducournau (source)

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